L’édito de Bike Café
Photo de couverture Philippe Aillaud – Se sentir à sa place Matthieu sur le plateau des Glières
J’écoutais l’autre jour le podcast 74 de Michaël Carminati qui échangeait avec Anouk Gilquin, une monitrice de ski qui roule en nationale 2. Lors de cet échange, la jeune championne, venue sur le tard à la compétition cycliste, dit à Michaël qu’à 28 ans – au milieu de ces pelotons de jeunes femmes qui contrairement à elle ont suivi très tôt la filière cyclisme – elle se sent à sa place. En entendant cette expression, je me suis dit que la question est surtout de trouver sa place. Certains ressentent dès l’enfance une évidence et sauront très tôt où se trouve leur place. D’autres, vont tâtonner, chercher, essayer et peut-être trouver comme cela semble le cas pour Anouk. Difficile de répondre aux questions posées par la philosophe Claire Marin « Jusqu’à quel point choisissons-nous notre place ? Jusqu’à quel point l’endroit où nous nous trouvons par hasard ou celui qui nous est assigné avec autorité doivent-ils nous définir ? »

Évidemment tout cela me ramène au vélo et à la relation que l’on peut avoir avec ce milieu cycliste, qu’il soit sportif ou pas. J’aime bien l’image du poulpe qui se fixe à son rocher et qui en prend sa couleur. Il n’a pas de problème pour être toujours à sa place. La jeune Anouk a trouvé la sienne dans la compétition, d’autres cyclistes la trouveront ailleurs. Tout cela semble parfait, à condition d’être en harmonie avec notre rocher. Il faut éviter de faire de la rando avec un dossard et inversement de faire la course lors d’une sortie cyclo. Dans le premier cas, ça ne durera pas longtemps, dans le deuxième, on verra toujours ces cyclistes pas assez costauds pour la vraie compétition, venir transformer la sortie du dimanche en critérium. On pourrait être des « poulpes » en panne de mimétisme. Le “cul entre deux chaises” n’a jamais été une vraie place… Face cette difficulté de positionnement entre compétition ou rando cyclo en club, d’autres cyclistes ont fait un choix différent. Ils pratiquent le mimétisme inversé en construisant un environnement fait pour eux et dans lequel ils se sentent à leur place. Je vous ai parlé par exemple des bandes sociales organisées. Sans obligation, sans contrainte, ils roulent ensemble en pratiquant une inclusivité libérale qui fait qu’ils se sentent parfaitement à leur place.
Pour Bike Café, je peux vous dire que nous nous sentons totalement à notre place. Quand on nous disait il y a 10 ans que parler de gravel c’était prêcher dans le désert, nous avons nous aussi adopté ce mimétisme à l’envers en créant un média à notre image. On m’a dit un jour : “vous n’avez pas de ligne éditoriale précise”. Est-ce un défaut ou est-ce que finalement c’est l’opportunité, comme le poulpe, d’être en harmonie avec le rocher qu’on choisira ? Cette liberté qui est la nôtre nous permet de satisfaire notre curiosité et visiblement la vôtre. Nous, on se sent à notre place, là où nous avons choisi d’être et nous sommes heureux de vous y retrouver.