Si Chamonix et le Mont-Blanc sont devenues les capitales du ski et de l‘alpinisme, la Palud et le Verdon celles de l‘escalade et des grandes voies, la station traditionnelle de Bardonecchia, située à l‘extrême ouest de l‘Italie, ouvre l’accès aux reliefs montagneux du Briançonnais et de la Maurienne. Elle pourrait, par son vaste territoire alpin, devenir rapidement un site majeur et reconnu pour tous les amoureux de parcours d‘excellence en vélo de gravel.
Bardonecchia (à 1300m) est une commune de la région du Piémont rattachée à la province de la haute vallée de Susa. Elle a su conserver le charme et l’authenticité d’une belle vallée de montagne. L’endroit foisonne de routes stratégiques qui desservent des forts d’altitude, vestiges de l’Histoire et des lignes défensives installées entre les deux pays. On y trouve aussi des chemins de passage et de communication qui investissent de jolis vallons, malmenés par la rudesse du climat, mais toujours accessibles et magiques en été.
Voici quelques trips gravel aventureux revisités, que je vous propose de découvrir au départ de Bardonecchia. Prenez la roue, et suivez le guide…
Le Col de Sommeiller (3002m)
Nous partons ici pour une des routes de montagne qui fait partie des plus hautes et des plus sauvages des Alpes. Attention le col du Sommeiller est au gravel ce que l’Alpe d’Huez est au cyclisme routier : un mythe, un monument, une route d’altitude secrète et silencieuse qui vous amènera en vélo à 3000m d’altitude. Mais attention, c’est aussi un des itinéraires Gravel les plus exigeants et techniques du secteur.
La route qui permet l’accès au col date des année 1960, nous sommes à l’époque glorieuse du ski ou l’enneigement de l’hiver permet d’imaginer en altitude les projets les plus fous, comme celui d’exploiter le glacier de Sommeiller pour la pratique du ski en été. Le projet bénéficie d’un budget restreint (une équipe efficace de moniteurs de ski Italien, un géomètre et une pelle mécanique) et voit la construction d’une route en terre de 19,5 km reliant le hameau de Rochemolles et le pied du glacier. Le réchauffement climatique, le déclin du glacier et les nombreuses avalanches récurrentes de l’hiver mirent fin à cette activité de glisse estivale. L’exploitation du site fut arrêtée en 1980, les installations démontées, les lieux ont retrouvé depuis 2015 leur état originel et toute leur authenticité.
Au départ de Bardonecchia suivre la route goudronnée qui remonte l’étroite vallée encaissée de Rochemolles jusqu’au hameau du même nom à 1610m. Puis remonter la piste de terre au-dessus du lac de Rochemolles en direction du plateau verdoyant des Granges du Fond (2134m). Continuez sur la rive de droite et laissez à votre gauche le traditionnel refuge Scarfiotti (CAI) à 2158m. Vous passez à présent devant l’ancienne cabane de péage, la vue est superbe et s’ouvre sur la massive face du Rognon d’Etache. Commence alors une ascension sportive, rythmée par l’enchainement de 16 lacets sur une piste en terre.
Passé ce verrou glaciaire, vous arrivez au Pian dei Morti à 2473m, autre replat bien mérité le long du tranquille Rio di Fond. La montagne devient nue et le cadre minéral, le silence est profond et l’éloignement total.
Une dernière série de lacets (mais pas des moindres) sur une piste très caillouteuse permet l’accès au col dans une ambiance hors du temps.
On est face à un champs de glace aminci, victime d’un déclin glaciaire évident où apparait dans une ambiance lunaire, le lac du Sommeiller : point ultime de cette montée.
Attention cette route très alpine est souvent recouverte de neige même en plein été. Si vous projetez d’en faire l’ascension, choisissez la période successive au 15 août pour mettre toutes les chances de votre côté et ne pas avoir à faire demi-tour.
Le Fort de Jafferau (2805m)
Les forts et les routes militaires sont d’inépuisables sources d’inspiration pour nous, cyclistes adeptes du gravel. La batterie de Jafferau est le fort militaire le plus élevé d’Italie. Il est situé à 2775m d’altitude, il est le deuxième ouvrage fortifié le plus élevé des Alpes après celui du Chaberton à 3130m. Son ascension est exceptionnelle car vous y découvrirez un vrai parcours alpin où tout se passe en vélo, aucun portage, une montée variée dynamique et intense dans de grands espaces dépouillés.
Au départ de Bardonecchia, direction Gleise pour rouler la route de Fregiusia, ascension de choix puisqu’elle fut à trois reprises le cadre et l’arrivée d’étapes du Giro d’Italie en 1972, en 2013 et en 2015. Sur les derniers kilomètres de la route de la station de Jafferau 2000 au lieu-dit Bacini (1908m) prendre un chemin à droite dans une courbe qui conduit sur un chemin forestier et le suivre jusqu’au fort de Foens.
Depuis le fort, le terrain devient plus large et la route caillouteuse. On aperçoit à gauche l’imposante masse compacte du Mont Seguret d’où sort tel un trou de souris, la galerie Séguret ou galerie des Sarrasins qui s’ouvre sur l’une des plus belles routes militaires de l’arc alpin occidental (la fameuse route 79 qui relie Salbertrand à Oulx et aux forts d’altitude).
La montée se prolonge en décrivant de belles courbes en lacets et permet d’accéder au col Basset à 2596 m.
Suit alors la plus belle partie de l’itinéraire sur une piste qui sillonne le long d’une crête à l’horizontale jusqu’aux casernes militaires de Jafferau.
La montée finale en direction du fort se redresse sur une piste plus chaotique (gardez bien les bords de droite car le cheminement y est plus facile). La piste devient plus technique ,mais la progression reste rapide pour enfin arriver aux forts dans un environnement panoramique exceptionnel.
Devant ce spectacle vous aurez à coup sûr du respect et de la fascination pour ces bâtisseurs qui reliaient les Alpes, mais aussi la satisfaction de leur avoir rendu hommage sur leurs routes d’altitude et leurs aménagements.
Le Col de la Rho (2541m) et le Col de La Vallée Étroite (2434m)
Sublime parcours frontalier sur terrain d’aventures, accessible en boucle depuis Bardonecchia entre les vallées jumelles de la Roue (IT) et celle de la vallée Étroite (FR). Vous y découvrirez la solitude des grands espaces, une nature indomptable et désertique, des escarpements rocheux semblables aux Dolomites et une vue privilégiée sur les sommets du Grand Argentier et du Mont Thabor, seigneurs des lieux.
Depuis Bardonecchia prendre plein Nord la vallée sauvage de la Rho et la remonter en alternant route et piste carrossables jusqu’aux Granges della Rho (1686m).
Depuis les granges prendre le chemin sur le versant droit en montant qui vous amène sur une route militaire (eh oui toujours !) et permet de remonter la vallée largement ouverte jusqu’à l’ancienne caserne militaire de « Piano dei Morti » construite en 1937 dans le cadre des travaux du mur occidental des Alpes.
Le relief devient plus soutenu et montagneux et oblige quelques portions de portage avant l’arrivée au col à 2541m. Le col de la Rho était autrefois l’un des passages les plus fréquentés entre les vallées de Susa (IT) et celle de la Maurienne et Modane (FR). C’est donc par cette ancienne piste muletière extrêmement caillouteuse rebaptisée « sentier de la mémoire » que la descente s’opère vers la vallée Française en direction du Lavoir.
La descente chaotique et pierreuse au début devient terreuse et agréable par la suite. Ne vous laissez pas filer jusqu’au parking du Lavoir mais préférez, l’accès au col de la Vallée Étroite par le col de la Replanette en passant par le hameau pastoral de Fontaine Froide (2080m).
Remonter alors sur un étroit single le fond du vallon sous le regard de la Gran Bagna. Après un rapide portage vous accédez au col de la Replanette (2338m) qui révèle à l’horizon l’élégance des cimes du Cheval Blanc et du Mont Thabor.
Une piste roulante permet de rallier le col de la Vallée Étroite à (2434m) et d’arriver ainsi dans les Hautes-Alpes.
Derrière le col, la vallée creuse un profond sillon et descend vers la plaine et le vallon de Tavernette. En suivant le sentier GR 57 jusqu’au « Pont De la Fonderie » on se laisse porter et on s’émerveille de cette nature si bien ordonnée. L’arrivée au « Refuge des Rois Mages » invite à la curiosité, ce petit bout d’Italie en territoire Français vous retiendra surement pour vous y restaurer. Dès lors, il ne vous restera plus qu’à laisser filer votre monture vers Bardonecchia et à savourer, des images plein les yeux, votre périple vélo en altitude.
Jérôme Furbeyre
C’est vraiment très très loin de chez moi 🙂 (plus de 1200 km, je suis complètement à l’ouest, même au nord ouest, région Brestoise)
Pfiou je pense que je serais jamais capable de prendre de telles côtes à vélo (sans moteur d’assistance) ^^
Mais je suis en train de finir de me monter un vélo “musculaire” que je vais donc essayer de ne pas électrifier, affaire à suivre ^^
Bravo pour votre article sur Bardonnechia
Nous avons parcouru les 2 premiers, mais attention à bien choisir les jours réservés aux vélos.
Pour nous, la montée a Jafferau a été gâchée par les nombreux 4×4 et motos.
Les amoureux de 4X4 et de motos off-road ont eux aussi droit à ces belles montées et ces beaux paysages. Il n’est pas bon de les pointer du doigt de cette manière, la montagne est suffisamment grande qu’elle puisse être partagée…
je pense que “la montagne” a aussi droit au silence et à l’air pur… à bon entendeur
@Franck P. je n’ai pas l’impression que Jean Claude B ai “pointé du doigt” les “motorisés”, il a simplement signalé qu’il y a des jours pour les vélos et d’autres jours pour les motorisés, ce n’est pas pointer du doigt mais informer sur une particularité il me semble 🙂
Et c’est vrai que si je vais à un endroit à vélo en me disant que je serais tranquille des pollutions sonores et souvent malodorantes des motorisés ça m’embêterais de me retrouver face à eux s’il est possible que ce ne soit pas le cas.
Merci pour ces trois articles intéressants. Avec nos Vae, (ma femme et moi)on a choisi le fort de Jafferau. SUPERBE !!!. Pas trop de motos (des allemands) et un seul 4×4. Bien qu’un panneau indique que ces engins ne peuvent utiliser la route militaire que le Mercredi et Samedi. Je pense qu’il faut éviter la montée le w.end. Nous sommes partis du hameau de Gleise afin d’éviter quelques km de goudron ennuyeux. Les dernières rampes sont bien dures à cause du pavage irrégulier avec les blocs de granit trouvés sur place. Par contre le travail a été bien fait car la route résiste encore !!!
Au sommet nous avons vu arriver 2 jeunes en gravel musculaire et tout le nécessaire pour camper !!!! Respect.
Avec eux, nous sommes redescendus par les pistes de la station de Jafferau au lieu de reprendre la route utilisée à la montée.
Arrivés à la station intermédiaire des remontées, on a pris une route appelée “Decauville” (ancienne voie de chemin de fer utilisée pour la construction de la digue du barrage de Rochemolles), route sans dénivelé sur un superbe tapis d’aiguilles de mélèze qui mène jusqu’au barrage. On a fait le tour du lac avant de reprendre la Decauville qui rejoint la route de montée en goudron. 51 km et 1450 m de montée.
La prochaine fois on ira directement en voiture au départ de la Decauville pour rejoindre la montée au Sommeiller et s’éviter un bout de route poussièreuse.Il semblerait que le Jeudi la route du sommeiller est interdite aux motos et 4×4. A vérifier.
La route pour le sommeiller (qui est trés fréquentée par les 4×4 et les motos, particuliérement le week end) est en effet interdite à ces véhicules le jeudi.