À peine les sentiers du Tour du Mont-Blanc délaissés par les trailers de l’UTMB, les cyclistes du GTMB (Gravel Tour du Mont-Blanc) se sont lancés à leur tour à l’assaut des pentes mythiques du massif Alpin. Ce haut lieu des sports outdoor, n’avait jamais inspiré un organisateur capable de proposer un Tour complet en mode race : 234 km avec un dénivelé positif de 8500 m : Wish One l’a fait et l’épreuve s’est déroulée récemment du 3 au 4 septembre. Le vainqueur : Emeric Turcat a bouclé l’épreuve en un temps canon de 12h15… (photos de cet article : Loris Von Siebenthal)
Le gravel en montagne
Peu de cyclistes pensaient la chose possible. Rien que oser accoler les mots Gravel et Haute montagne : ça fait peur. À plus de 2000 m d’altitude, cela change tout… Le gravel, on le sait, est un vélo qui peut rouler à peu près partout, mais ceux qui connaissent l’endroit n’imaginaient pas y voir un jour rouler ce type de vélo en mode race. Comment vaincre ces sentiers montagnards sur des vélos non suspendus, chaussés de pneus de 40 ?
On avait suivi, grâce à Jérôme Furbeyre, cette pratique en montagne qu’il effectue en tant que guide. Luc Royer, de Chilkoot, a également proposé sur son catalogue d’événements des épreuves montagnardes… mais une épreuve en mode course, sur une telle distance : c’est nouveau. Le gravel en montagne n’est plus un rêve que l’on ne peut pas atteindre. Il y a un dicton qui dit “On ne déplace pas les montagnes…” Est-ce que notre vélo de gravel n’est pas en train de tenter le coup en suivant la parole de Confucius qui lui disait “Celui qui déplace la montagne, c’est celui qui commence à enlever les petites pierres…” : il faut reconnaître que Wish One a fait bouger quelques grosses pierres avec ce GTMB.
La course
Ils sont partis de Megève le samedi 3 septembre à 5h du matin comme des “Pionniers”, ils sont revenus en “Héros” après avoir bouclé le Tour du Mont-Blanc en gravel et les 234 km – 8500m D+ du parcours, imaginé par Nicolas Roux (co-organisateur de la course avec FX Blanc et Maxime Poisson de Wish One).
Ils sont au bord des larmes tellement ils sont émus…
FX Blanc était sur le terrain “C’est beaucoup plus riche de voir ce qui se passe dans le milieu du peloton et chez les derniers. Les gars, ils ont vécu un gros truc, ils sont au bord des larmes tellement ils sont émus. Pour les premiers, ce n’est pas une même aventure. Ils s’engagent physiquement mais à l’arrivée ils ne sont pas au bout de leur vie...”, me déclare François-Xavier Blanc qui a suivi le déroulement de l’épreuve, veillant à ce que tout se passe bien. Il me raconte l’histoire du coureur italien qui même en étant hors délai avait tenu à finir. “Le gars il a dormi à la Fouly et il est arrivé le lendemain au moment de la remise des prix. Du coup il a eu son heure de gloire, célébré presque comme un vainqueur...¨
La météo a été limite avec quelques averses, surtout pour ceux qui sont arrivés dans la nuit, mais heureusement pas de nature à perturber le déroulement de la course.
Cette première édition du GTMB a vécu en tête un duel incroyable pour la victoire chez les hommes, entre Emeric Turcat et la légende suisse du VTT Christoph Sauser. C’est dans la dernière partie de la course qu’Emeric Turcat a fait la différence, pour inscrire son nom au palmarès du GTMB 2022 avec un temps canon de 12h15 !
Chez les femmes, Ali Gibb (Wish One Racing), seule femme au départ, a quant à elle repoussé ses limites pour vaincre les 8 cols du parcours, dont 2 à plus de 2500 m d’altitude avec Le Col de la Seigne et le Grand Col Ferret, pour arriver à Megève au bout de 20h56 d’effort.
Un format HALF (140km – 5000m D+) était aussi au programme avec un départ depuis Courmayeur en Italie. C’est le français Sébastien Jarrot (Assos) qui s’est imposé en 8h19.
Le dimanche, une rando sportive de 75km 2500m D+, le Gravel Tour du Mont Joly parrainé par le Crédit Agricole des 2 Savoies a offert à un public plus large et plus féminin, une expérience gravel avec des vues imprenables sur le Mont-Blanc tout au long du parcours.
Une femme dans la course
Le plus dur pour moi a été le col de Voza sur la fin, en poussant mon vélo bien chargé…
Ali Gibb était la seule femme dans la course. Elle a terminé en 20h56 dans la nuit sous la pluie. “J’avais déjà fait le tour du Mont-Blanc en vélo de route, ça me plaît, j’aime bien rouler en montagne. J’ai commencé le gravel en 2020 : j’adore, et quand j’ai su que Wish One organisait le tour en gravel j’ai décidé de le faire. Ce n’était pas pour faire la course, mais simplement pour aller au bout et finir“, me dit Ali. Comme pour les autres concurrents, rien n’a été facile. Elle a grimpé pratiquement entièrement le col de la Seigne sur le vélo, rattrapant au passage quelques hommes, il lui a juste manqué les derniers 200 mètres.
“Le plus dur pour moi a été le col de Voza sur la fin, en poussant mon vélo bien chargé, dans la tempête et dans la nuit. Il a beaucoup plu la dernière heure. J’ai fait une chute aussi, juste avant la descente sur Megève, à cause de la boue”, poursuit Ali. Elle utilisait sur son Wish One Sub un mono plateau de 38 avec un 42 derrière. Elle avait opté pour des roues de 650 montées avec des pneus Vittoria de 47. Elle avait également ajouté des rubans de gel sur son guidon pour amortir les chocs sur ces pistes rocailleuses.
Un champion sur les pentes
Un parcours magnifique mais très très exigeant avec ses 8500 de D+
Les passionnés de vélo connaissent Laurent Brochard qui a été champion du Monde sur route en 1997. Laurent a eut une longévité sportive remarquable dans le peloton pro qu’il a quitté à 39 ans. Il a ensuite basculé avec talent dans la course à pied : marathon puis trail running. Ce grand sportif découvre à plus de 50 ans le Gravel et le moins qu’in puisse dire, c’est que ça lui plait. Ça fait un moment qu’il suit les épreuves proposées par Wish One et c’est sa femme qui a voulu lui faire plaisir en l’inscrivant sur ce GTMB. Il a eut effectivement du plaisir pour sa première participation sur une telle distance.
“Officiellement c’était 234 km, mais en réalité c’était plutôt 250 km pour moi… Tout ça à cause d’un GPS obsolète qui a fait du zèle, et des détours “parce que c’est joli “… Un parcours magnifique mais très très exigeant de 8500 D+, qui fait de cette course gravel une des plus difficiles au monde. Je n’ai pas fait ma traditionnelle fringale et j’ai plutôt bien géré tous ces kilomètres. Je suis assez satisfait de moi pour cette première expérience aussi longue en gravel… Je n’avais pas roulé autant depuis probablement 2007 à la fin de ma carrière pro. L’entraînement reste la base de la réussite et revenir en forme n’est pas chose aisée après un arrêt si long. Chaque gravel me permet de me remettre dans le bain, perfectionner mes choix quant au matériel… je regarde le calendrier et je zieute déjà les prochains objectifs. Merci et bravo à l’organisation pour son accueil et son travail, Nicolas, Maxime, FX et les autres. À ma femme et mon bébé, qui m’ont assisté et encouragé tous ces kilomètres ce qui contribue à faire de cette journée une réussite . Je boucle cet événement en environ 16 h40…”, déclare Laurent sur sa page Facebook.
Palmarès
GTMB 2022 Femmes
1 – Ali Gibb (Wish One Racing)
GTMB 2022 Hommes
1 – Emeric Turcat (Tribe Sport Group)
2 – Christoph Sauser (SPECIALIZED – HORIZONTE COFFEE)
3 – David KOECHLI (Go Fast) / Nicolas Hartmann (Go Fast)
HALF GTMB 2022 Hommes
1 – Sébastien Jarrot (Assos)
2 – Ignacio Morales
3 – Blaise Raybaud
Les résultats complets sont ici : https://my.raceresult.com/216942/
On l’a fait l’année dernière avec le gravelman Montblanc… Sauf que ce n’était pas une course chronométrée … Mais bon même distance et quasi même dénivelé … Pas la peine d’en faire des héros
Bon … bien disons que vous aussi vous êtes des héros : bravo. Pour l’avoir fait en trail il y a quelques années je mesure le niveau de difficulté sur des vélos de gravel, c’est pour moi héroïque.
J’espère que le parcours était adapté au gravel parce le TMB officiel c’est même pas la peine. Cet été j’ai passé une fille qui poussait son gravel dans l’ascension du petit col Ferret, ça n’avait aucun sens de voir un gravel à cet endroit.
J’ai participé au Gravel Tour du Mont Blanc que j’ai fait en mode rando (bouclé en 24h), pas en mode compétition. Le parcours avait quelques passages communs avec le TMB (col de Seigne, Grand Col Ferret et col de Voza) mais c’était bien adapté au gravel. Mon objectif était de finir et prendre un maximum de plaisir ce qui a été vraiment le cas. Moi qui aime la rando, le vélo et la montagne, j’ai adoré le parcours, l’expérience montagnarde et l’aventure humaine avec les quelques participants que j’ai croisés régulièrement dont Thomas mon “co-équipier” d’une nuit avec qui j’ai roulé les 10 dernières heures.
Pousser son vélo dans un col ne me parait pas un contre sens si la descente vaut le coup ce qui était vraiment le cas.
Et mention TB à l’organisation avec des vrais ravitos et des petites attentions et du support tout au long du parcours et à l’arrivée.