Le Ventoux attire de nombreux événements vélo. Arrivant par les trois montées : Malaucène, Bédoin, Sault, une noria de vélos de toutes sortes emprunte la route qui mène au Col des Tempêtes. Les coureurs du Tour de France se livreront ici le 22 juillet prochain un combat de titans, devant des millions de téléspectateurs. Pour d’autres, se hisser au sommet est l’exploit de leur vie. Le VAE a démocratisé cette montée du Géant de Provence qui les conduit à 1910 mètres d’altitude. Chacun choisira son challenge, pour moi c’est d’y arriver en mono vitesse (single speed) en compagnie de mes deux amis Alain et Jean-Yves qui sont en pignon fixe. Notre motivation est de lancer ici l’opération des Bacchantes à vélo 2025, dont Bike Café est partenaire. L’événement Atracktion au départ de Pista Café à Bédoin, que j’ai découvert l’an dernier, est le support idéal pour lancer cette nouvelle saison des Bacchantes qui se déroulera en partenariat avec des cafés vélo et des lieux solidaires partout en France.
Atracktion
Atracktion est un événement en pignon fixe, inventé par Jean-Sébastien Dimeglio qui gère avec sa compagne Vicky Carboneau le café vélo Pista à Bédoin. Je me suis inscrit avec mes deux copains : Alain et Jean-Yves à la 4ème édition de ce rendez-vous des amateurs de fixie, attirés chaque année par cette montée du Géant de Provence. C’est ça l’Atracktion !
L’an dernier, l’ascension s’est faite par Malaucène, dans le brouillard et la pluie, cette année elle s’est déroulée par Bédoin, sous le soleil et la chaleur. Au programme du week-end, Atracktion propose trois sorties en vélo au départ de Pista Café : un “warm-up” le vendredi, la montée du Ventoux le samedi et le dimanche, en guise de dessert, le tour du Ventoux sur les petites routes de ce magnifique territoire.
Ils sont fous de faire ça en fixie !
T’as mis quel braquet pour
demain ?
Les « forçats de la route » n’avaient pas le choix : ils roulaient en pignon fixe, car le dérailleur, pourtant inventé en 1869, n’a été autorisé en course qu’en 1937. Aujourd’hui, des cyclistes, qui sont loin d’être condamnés aux travaux forcés, ont fait ce même choix, dans la joie et la bonne humeur. J’ai découvert cette communauté l’an dernier, lors d’un reportage réalisé pour le magazine Cyclist. J’ai voulu y revenir cette année avec l’idée de monter moi aussi là-haut en compagnie de mes deux amis avec qui j’ai fait les Bacchantes à vélo l’an dernier lors de notre trip entre Paris et Aix-en-Provence en fixie. Nous étions alors impressionnés par la montée du col de la République à la sortie de Saint-Étienne, là c’est une autre histoire : il s’agit du Ventoux.
On retrouve la bande de fous du fixie du vendredi à Bédoin dans le jardin de Pista Café. Le parc vélo est toujours impressionnant avec ces superbes machines minimalistes et la question immédiate sera : “T’as mis quel braquet pour demain ?” Les chiffres que j’entends au dessus d’un ratio de 2 me laissent rêveur. Le plus gros braquet me semble être celui de Stéphane Rocques de Montpellier : 49×17 (ratio 2,9). Perso, petit joueur et surtout en mode single speed (le plus mauvais des deux mondes) je suis sur un 35×22 (ratio 1,6), comme Jean-Yves, et Alain sera sur du 42×21 (ratio 2). Pour les meilleurs chronos de la montée, Marco, qui roule sur un Quokka est en 49×24 (ratio 2,05). Amaury est en 46×22 (ratio 2,10) et pour les femmes, Agnès avec son Skreambike tire un 42×21 (ratio 2). La dernière fois que je suis monté par Bédoin, j’avais un 32×34 (ratio 0,94). Âgé de 30 ans, je pratiquais le cyclotourisme et je faisais les brevets cyclo-montagnards avec un 42×24 (ratio 1,75).
Un Warm-up chaud bouillant
Petite mise en jambes le vendredi en fin d’après-midi, en mode chill un peu appuyé. Une belle bosse avec du 9 % pour chauffer les cuissots et se dire que demain ça va être beaucoup plus dur. Ambiance détendue, Jean-Yves et sa femme Murielle nous rejoignent le soir pour la pasta party. On verra demain si les sensations se confirment…
Jour J : la montée par Bédoin
7h30 chez Pista Café, le jardin se rempli. Certains ont démonté les plateaux utilisés hier sur le Warm-up et adapté la longueur de chaîne pour mettre un braquet plus raisonnable, avec un pignon pour monter et un plus petit pour la descente en tournant la roue.
La montée
Je tourne ma roue au kilomètre 5 avant le virage de Saint-Estève où la route s’élève brutalement à 12 %. Je passe du 19 au 22 dents pour attaquer le tronçon le plus dur de cette montée par Bédoin jusqu’au chalet Reynard.
La montée va devenir compliquée pour moi. Alain me soutient et m’invite à deux arrêts voyant que je ne suis pas au mieux. Jean-Yves semble plus facile : il zigzague un peu sur la route pour faire baisser le pourcentage de la pente. Peu avant le chalet Reynard, je craque une première fois. Jérôme de Radio Sports – qui réalise notre film – me monte au chalet. Je reprends des forces : un gel et beaucoup d’eau avant de décider d’attaquer le final. Douleurs au niveau du foie, nausées… Je craque une deuxième fois et même s’il ne reste que 2 km, ce final est terrible pour moi sous cette chaleur. Jérôme vient une nouvelle fois à mon secours. Je retrouve Alain et Jean-Yves en haut, je suis déçu de mon erreur de braquet : un 24 dents aurait été plus raisonnable. Photo en haut avec mes amis, même si je ne la mérite pas…
La descente
À peine ai-je eu le temps d’entamer la descente derrière Alain, que cela a failli mal finir : explosion de la chambre à air avant. Le pneu est même sorti de la jante. Ma chambre en latex a éclaté et elle s’est déchirée sur au moins 20 cm de long. Peut-être trop gonflée et avec l’altitude elle a explosé dans le pneu. Ouf ! Heureusement que je n’allais pas vite et que j’étais en ligne droite. Réparation et arrivée au chalet Reynard où on dit au revoir à Jérôme qui redescend sur Bédoin. On prend la direction de Sault en profitant de cette belle descente. Jean-Yves m’annonce 39 °C mesurés par son compteur GPS.
Notre vitesse, limitée par le nombre de tours du pédalier de Jean-Yves et son 35×22, va nous permettre de profiter du superbe paysage. La chaleur est écrasante, mais heureusement la route bordée d’arbres nous procure un peu d’ombre.
On arrive à Sault et on cherche un restaurant pour manger. Il est 13h30 : on a soif et faim. Je commande un coca (ce qui est exceptionnel pour moi) pour calmer la nausée de la montée qui m’a laissé un point douloureux au foie. Hydratés et restaurés nous reprenons notre route pour le clou du spectacle qui nous attend, dans les gorges de la Nesque. Ce n’est pas une première pour moi, mais je suis toujours impressionné par le spectacle grandiose de ces gorges profondes. Jean-Yves, qui les découvre, n’en perd pas une miette. Pas une voiture sur cette route qui est un véritable billard sur lequel les 3 boulets que nous sommes roulent, toujours à la vitesse du 35×22, vers Villes-sur-Auzon. La chaleur est intense, les passages dans les tunnels creusés dans la roche sont trop brefs pour nous rafraîchir.
Arrêt à la fontaine d’eau de source de Villes-sur-Auzon et on file via Flassan vers Bédoin où une bonne bière nous attend au Pista Café. Bilan positif, sauf pour moi qui ai coincé dans le final. Cette douleur au niveau du foie et sans doute un braquet trop ambitieux pour moi m’ont privé de la totalité de cette grimpette, cependant j’ai réussi à faire le plus dur. Le single c’est moins facile qu’en fixe dans les montées. En fixe la roue arrière apporte de l’aide au pédalier par l’inertie de la roue arrière. Par contre, en descente je suis avantagé en me laissant filer sans avoir à pédaler. Alors que sur un fixe, il faut pour ralentir musculairement le rythme infernal qu’impose la pente au pédalier.
Le parcours
Le classement
On n’oublie pas que nous sommes inscrits à Atracktion, mais pour nous le chrono n’avait pas d’intérêt. L’idée était de monter à notre rythme tranquille. Par contre, nos jeunes amis se sont livrés un combat des chefs sur le segment de la montée du Ventoux dans le club strava de l’événement. Marco Jumel a fait le meilleur temps, mais le record de 1h15 par Bédoin établi par Amaury en 48×22 sur son Fuji Track de 2011 tient toujours. Un temps que beaucoup de “déraillés” de très haut niveau aimeraient réaliser. “Mon record sur un vélo de route Specialized Aethos, est de 1h20 ! J’ai été plus rapide en fixe“, me dit Amaury.
Épilogue
Fatigués par la chaleur et surtout par les efforts de la veille, on décide de revoir à la baisse le parcours du dimanche. On va partir avec un autre groupe de copains en fixe pour aller monter le Col de la Madeleine via Beaumes-de-Venise. Avec Louis, Victor et Kevin nous voilà partis Alain et moi pour 44 km plutôt en mode récup. Le challenge sera pour Victor, 120 kg, qui se frotte pour la première fois à un col. Il pratique habituellement le fixe sur du plat dans sa région. On va gérer et il va y arriver tranquille.
Les Bacchantes à vélo 2025
Nous aussi on a des idées fixes… L’opération 2024 des Bacchantes à vélo devait avoir une suite. Cette année se sera des “rides pas sérieux, pour une cause sérieuse” un peu partout en France avec pour partenaires des cafés vélo. Notre présence ici à Bédoin au Pista café symbolise le lancement des Bacchantes à vélo 2025. Vous en saurez plus prochainement dans un article spécifique qui vous présentera le projet.