Le vélo est un sport individuel qui n’empêche pas qu’on aime le pratiquer en groupe. Les pelotons du dimanche matin, qui agacent parfois les automobilistes, existent traditionnellement depuis de longues années. Depuis quelque temps et surtout depuis que nous sommes sortis de la léthargie pandémique, cette envie de socialisation en groupe par le vélo a pris une nouvelle dimension. Le « social ride » est venu concurrencer la classique sortie de club… Des cyclistes ont découvert qu’ils pouvaient créer eux-mêmes leur tribu en se donnant rendez-vous sur Instagram ou Strava. Le vélo est un révélateur de notre évolution sociale. L’outil populaire qu’il était s’est intellectualisé et ces nouvelles bandes sociales organisées, inclusives, découlent de cette évolution sociologique.
Les périodes de rupture impactent les organisations et les pratiques. On a pu constater que les institutions, coincées dans la verticalité des rôles, n’avaient pas la mobilité d’esprit pour réagir rapidement aux phénomènes sociaux. Le vélo est le miroir d’une société qui bouge plus vite que ces organismes figés dans leur fonctionnement. Au garde-à-vous face aux injonctions étatiques et la dépendance des budgets associés, elles ont du mal à sortir du cadre. Sur les aspects sociologiques ou sur l’évolution des pratiques vélo, la base des cyclistes adopte plus vite les changements. La verticalité ralentit l’action et le vélo, outil de liberté, se faufile dans ces espaces créatifs. Ainsi le terme “ride social”, désolé de le dire à ceux qui le conteste, a apporté un peu de fraîcheur à nos rassemblements cyclistes. Il réunit les déçus des structures vieillissantes et surtout, il accueille les néo-cyclistes qui ne les trouvaient pas attirantes.
Et si ces rides sociaux prenaient la parole pour exprimer un vrai sens social ? En fait, cette année, j’ai tenté une expérience avec les Bacchantes à vélo en sollicitant quelques-uns de ces lieux où j’ai senti frémir, au-delà du plaisir de pédaler ensemble, un intérêt aux problèmes de société. Des causes méritent qu’on consacre un peu de notre temps sportif pour en parler, échanger sur la prévention de maladies et sur l’utilisation du sport pour les prévenir et aussi pour se remettre en selle après une maladie. Nous sommes en octobre : « Octobre rose », ça vous parle ? Oui, sans doute, car les femmes parlent plus facilement de leur cancer. Pour les hommes, c’est plus compliqué : un tabou existe sur le cancer de la prostate qui est la première cause de mortalité masculine par cancer. Nous entrons dans le mois de novembre et le mouvement « Movember » est nettement moins populaire. En novembre, il est convenu de se laisser pousser la moustache et surtout de se dire qu’il faut faire quelque chose pour infléchir les chiffres : 8000 décès et 50 000 nouveaux cas chaque année. Alors, je vous propose de rouler moustachu en rejoignant nos rides pas sérieux, pour une cause sérieuse et/ou faire un don à l’association que nous soutenons pour combattre cette maladie. Mon rêve serait que chaque année, tous les cyclistes femmes et hommes consacrent, lors de ces mois d’automne, un peu creux en rendez-vous sportifs, une sortie dans des rides sociaux nationaux pour donner du poids aux actions visant à combattre ces maladies que l’on voit sans cesse progresser. Cette utopie me plait bien et j’espère que nous pourrons la transformer en réalité ensemble. Pas besoin de campagnes publicitaires couteuses, de “journées nationales” dont tout le monde se moque… juste une prise de conscience, un rendez-vous cycliste social entre amis à la date qui convient au groupe et mises bout à bout ces initiatives feront socialement progresser ces causes en utilisant le pouvoir du vélo.
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