Mais pourquoi greffer des pattes pistes à l’arrière ?
Dans un article précédent nous vous avons parlé de ligne de chaîne mais il convient d’ajouter à ce chapitre un complément indispensable qui lui concerne la “tension de chaîne”.
Le vélo de piste ou son petit fils le “fixie” comme le “single speed” son proche cousin n’ont pas de dérailleur et ne possèdent donc aucun système de tension de chaîne. Il y a donc obligation de pouvoir tendre la chaîne en déplaçant la roue arrière d’avant en arrière à l’intérieur des pattes de fixation arrières … Cette contrainte existait déjà sur les premiers vélos de course au début du 20ème siècle. Vous verrez donc sur les cadres très anciens des pattes arrières horizontales et ouvertes sur l’arrière. Le vélo de piste a gardé pour cette raison ce type de pattes alors que le vélo de route, qui a évolué avec l’arrivée du dérailleur, a vu ses pattes s’ouvrir vers l’avant.
On peut supposer que c’est l’arrivée du blocage rapide (*) sur les roues qui a provoqué cette volte-face. En effet, le serrage parfois moins efficace que celui des écrous des vélos anciens risquaient de provoquer des sorties de roues. On peut modifier un cadre route ancien pour en faire un fixie sans avoir à changer le type de pattes à condition que celles ci soient horizontales et suffisamment profondes pour permettre le réglage de tension … mais si tu veux “le look Coco ! …” la patte piste est plus tendance.
(*) C’est en 1927 que Tullio Campognolo perd une course à cause d’une crevaison et d’un écrou récalcitrant et qu’il met au point son serrage rapide pour les roues.
Alors modifions …
Nous avons pris comme cobaye le cadre du Thomann trouvé sur le trottoir pour se livrer à l’exercice. Le cadre est démonté il est maintenu fermement dans les mors de l’étau.
L’outillage nécessaire …
Si on persiste dans l’image de la greffe voilà tous le matos nécessaire au chirurgien dans sa salle d’opération.
Une meuleuse équipée d’un disque mince pour tronçonner le métal, une scie à métaux, un jeu de limes, une pointe à tracer et un pointeau. On doit pouvoir disposer d’un poste à souder oxy-acétylénique avec brasure acier et une perceuse colonne si possible. Le poste à souder semi-automatique est un plus on verra pourquoi plus loin.
Fournitures :
- Deux morceaux de tôles d’acier épaisseur 4 mm (80 x 80 mm),, un bout de tôle en alu qui va servir de gabarit de découpe (épaisseur 2 mm à la taille de la patte)
- Un outillage simple à réaliser à partir d’un axe plein de roues arrière (longueur 140 mm diamètre 10 mm) avec deux paires d’écrous et 4 rondelles larges diamètre extérieur 20 mm. Avec un fer plat de 10 x 20 mm longueur 200 mm
Ablation des pattes actuelles …
Comme dans toute greffe il faut d’abord procéder à l’ablation des organes à changer … Mais avant d’attaquer cette opération il vous faut prendre la dimension entre les pattes actuelles. On devra retrouver cette dimension après soudure des pattes dans le cas ou vous réutilisez la même roue. Cette dimension varie de 110 mm pour un vélo de piste à 120 mm pour un 5 vitesses.
On coupe la patte par deux traits de disque, on sort le poste de soudure pour dessouder les “racines” de pattes restées dans les haubans et les bases arrières. Attention au moment de la chauffe, le tube est mince …
On réalise un gabarit.
On trace le gabarit de la patte à réaliser sur le morceau de tôle alu (la patte gauche est identique à la patte droite).
Note sur les pattes pistes :
On voit en vente sur certains catalogues des jeux de pattes pistes. Hélas l’angle (voir schéma ci-dessous) formé par les haubans et les bases arrières varie en fonction de la géométrie du cadre. L’angle est souvent de 70° mais on a relevé sur certains cadres d’artisans comme le cadre B. Carré un angle de 75°. La forme est indiférentes pourvu que l’angle respecte la géométrie du cadre.
Le gabarit terminé va maintenant être utilisé pour fabriquer le jeu de pattes en acier.
On fabrique un jeu de pattes.
On vient serrer les deux tôles et le gabarit par une pince étau. Avec la pointe à tracer on délimite la découpe à l’aide du gabarit. Dans l’axe du demi oblong qui reçoit le déplacement de l’axe on vient faire deux coup de pointeau. L’un au fond de l’oblong et l’autre à la sortie de l’oblong.On perce deux trous taraudés permettant de mettre en place deux vis de 10 mm qui vont remplacer le serrage de la pince étau pour maintenir les deux tôles serrées l’une contre l’autre avec le gabarit jusqu’à la fin du découpage à métaux. On perce tout autour de la trace puis on découpe. On termine à la lime et à la bande abrasive pour les chants et les bavures.
Vous voilà maintenant avec deux magnifiques pattes pistes faites “maison” avant ajustage final
On positionne les pattes dans les tubes du cadre avec l’outillage. L’axe doit se trouver en butée au fond des pattes. L’entre-axe entre pattes après serrage des écrous de l’axe doit correspondre à l’entre-axe mesuré avant suppression des anciennes pattes. La dimension entre l’axe du boîtier de pédalier et l’axe dans la patte doit être identique à droite comme à gauche. On glisse un fer plat de 10 mm dans les oblongs des 2 pattes pour garantir leur parallélisme.Le cadre posé sur une surface plane (ici une table en verre) ne doit pas “boiter”. On redémonte, on ajuste et on remonte autant de fois qu’il est nécessaire. La brasure peut rattraper quelques petits défauts mais pas les gros.
Brasure des pattes
On va laisser l’outillage en place pour effectuer la brasure. On peut passer une sangle entre l’axe et l’entretoise des haubans pour faciliter le pointage soudure.
On est prêt pour la soudure. Si vous possédez un poste à souder semi automatique , on peut pointer les haubans et les bras avant de braser ce qui évite la distortion inévitable due à la chauffe pour la brasure. Sinon on pointe en brasure, on brase et c’est terminé.
Il existe plusieurs types de brasure, celle que nous avons utilisé pour ce cadre est la brasure la plus courante que l’on trouve dans les grandes surfaces. A la différence de celle des artisans qui fond à plus basse température celle-ci fond à 920° et nécessite un plus gros travail de reprise pour un fini acceptable.
Pierre
Bonjour, Bel Article ! Très complet, mis à part peut être quelques adresses où cela est réalisable si on n’a pas l’outillage nécessaire à disposition (notamment le poste à souder oxy-acétylénique…)
Bonjour,
Super cet article ! Très interessant et bien fait !
Par contre, j’ai une question : pourquoi ne pas souder la patte complète au semi auto ?
bonjour guillaume,
merci de nous lire et d’apporter vos commentaires. Bien qu’équipé en semi auto je n’utilise pas cet équipement sur des cadres vélos, cela ne me semble pas approprié.
cordialement
Pierre
Bonjour très bon article, assez clair, mais juste une chose que je n’ai pas compris comment avez vous fait pour dessouder les racines avec le poste de soudure ? Quel est le type de soudure des pattes à l’origine ?