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La nuit où j’ai dormi sur 200 cadavres …

Le voyage à vélo et l’itinérance est le moyen sûr de vivre une aventure. Les découvertes sont nombreuses pour un budget souvent très raisonnable. Un vélo passe à peu près partout et se confond dans le paysage. C’est également un excellent prétexte pour ouvrir un dialogue avec les personnes rencontrées et découvrir toutes les facettes d’un pays ou d’une contrée. Marie a vécu cette aventure l’été dernier dans les îles des Hébrides.

« Je suis partie l’été dernier en juillet pour 4 semaines d’itinérance en biclou avec mon matériel de bivouac dans les Hébrides extérieures (îles du Nord-Ouest de l’Écosse). Je ne partais pas dans l’inconnu car je connais très bien l’Ecosse mais jusqu’à présent c’était en famille, en voiture avec mon vélo dans le coffre. » … déclare Marie

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L’idée de Marie était de voyager en autonomie et à petit budget. Elle repartait ensuite en Slovaquie en août et voulait investir le moins possible dans l’équipement et faire avec les « moyens du bord ». Un ami lui a prêté deux sacoches (par chance parfaitement waterproof : de marque Orlieb , qu’elle recommande) il lui fallait les remplir de tout le matériel nécessaire y compris l’habillement. Nous vous livrons dans cet article son retour d’expérience et les conseils pratiques qui en découlent. 

Ma nuit sur l’île de Vatersay

Marie nous raconte …

Depuis déjà une semaine je suis sur mon VTT explorant les Hébrides Extérieures. L’Écosse est un enchantement que je pratique depuis plusieurs décennies, le vélo est pour moi une passion quelque peu dévorante. L’alliance des deux était une évidence.

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Le 14 juillet je me réveille sur l’ile de Vatersay. J’ai passé une nuit merveilleuse dans ma tente, bien camouflée au milieu des dunes.  Il ne pleut plus depuis hier, ce qui m’a permis de faire sécher mes affaires détrempées par trois jours d’un déluge incessant. Honnêtement j’ai dormi comme un bébé. Aucun squelette n’est venu hanter mes rêves, pas le moindre hurlement dans la nuit, aucun bruit de naufrage.

Le matin j’ai roulé mon duvet, démonté la tente, rangé les sacoches, puis je suis repartie sur mon vélo. J’ai bien vu un monument, je me suis approchée pour le voir, j’ai un peu lu, mais pas beaucoup car le temps se couvrait, une tempête était annoncée. Il me fallait vite repartir pour prendre un ferry et vivre d’autres aventures. J’ai gardé un souvenir merveilleux de cette nuit et j’ai oublié la stèle.

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C’est en écoutant Ruairidh Mac Illeathain raconter l’histoire de L’Ecosse que j’ai appris la chose suivante : en août 1853 la Annie Jane, un fameux trois mats de 1294 tonnes lourdement chargé quitte Liverpool pour le Quebec. Au large de l’Irlande un gros coup de vent endommage les mats, l’équipage répare mais les quelques 400 ou 500 migrants à bord prennent peur et demandent à rentrer.

Le capitaine obtempère et ramène le vaisseau à Liverpool. Une semaine plus tard le voilà reparti. Certains migrants n’ont pas voulu remonter dans l’embarcation l’estimant peu fiable. Ils ont bien vite été remplacés par d’autres malheureux prêts à tout pour fuir la misère.

Quelques jours après ce nouveau départ même scénario : gros coup de vent, mâts fragilisés et les passagers qui demandent à revenir. Que nenni : le captain Mason entend bien cette fois enfin emmener sa cargaison au Québec !

Pourtant  rapidement la situation s’envenime, le capitaine se rend à l’évidence et rebrousse chemin pour l’Irlande. Il est trop tard hélas, le bateau se casse en trois vers minuit à l’entrée de Bàgh Siar sur l’ile de Vatersay.

Sur cette petite île (isolée de tout à l’époque) vivent 64 personnes pauvres dans des blackhouses.  Elles découvrent l’ampleur du désastre le matin du 29 septembre 1853 et organisent rapidement les secours.

Il y avait 450 personnes à bord, presque 350 furent portées disparues. Il leur faut accueillir 102 survivants (dont le captain Mason), les  loger, les réchauffer, les nourrir, sans savoir comment les évacuer alors que les habitants eux-mêmes n’ont grand chose à se mettre sous la dent…

200 cadavres au moins sont rejetés par la mer. Le cimetière est trop petit pour les accueillir. Faute de mieux ils seront enterrés en urgence sans sépulture ni emplacement précis dans les dunes juste derrière la plage. 160 ans plus tard, à cause de l’érosion, certains craignent de les voir réapparaître.

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J’ai tellement aimé l’île de Barra, comme celle de Vatersay, que je compte bien y retourner sur mon biclou. La prochaine fois, sur Bàgh Siar je choisirais un endroit surélevé pour installer la tente et je ferais attention de ne pas planter les piquets trop profondément. Je ne craindrais ni les fantômes ni les revenants mais j’arpenterais cette fois la plage en songeant à tous ces malheureux partis chercher fortune au loin ….

Plus d’infos :

http://www.anniejane.net/

Côté pratique : conseils et matériel

Les conseils de Marie …

Malheureusement, ma bonne dame, « the scottish weather » n’est plus ce qu’il était ! Changement climatique oblige, le dicton local « Si le temps ne te plaît pas, attend 5 minutes … » a du plomb dans l’aile. Historiquement la spécialité locale c’est l’averse :  5, 6, 7 ou même 10 dans la journée, entrecoupées d’accalmies parfois très ensoleillées.  Si ce temps typique perdure toujours, les épisodes de chape de nuages provoquant une pluie quasi diluvienne pendant plusieurs jours sont devenus monnaie courante comme j’allais l’apprendre à mes dépens.

Je suis partie avec deux tenues de vélo :

Pour le corps :

  • 2 cuissards courts (marque Craft)
  • 2 tee-shirts courts de vélo (tee shirt club)
  • 2 tee-shirts manches longues en vêtements techniques (un Gore, un vieux modèle D4)
  • 1 veste de vélo légère (vêtement de club, ancien modèle Poli)
  • 1 veste imperméable de vélo D4
  • 1 veste imperméable de course à pied Raidlight
  • 1 paire de jambières (marque Gore)
  • 1 paire de manchettes
  • 2 écharpes très légères en soie (fabrication maison)
  • 1 pantalon imperméable Adidas (jamais mis !)
  • 2 soutiens-gorge D4 (ancien modèle)
  • 1 culotte (jamais mise)

Pour les extrémités :

  • 1 paire de gants de vélo
  • 1 casquette
  • 1 paire de chaussures de trail (j’avais enlevé les pédales automatiques que j’ai remplacé par des pédales plate-forme pour plus de polyvalence)
  • 1 paire d’après ski D4 (ancien modèle)
  • 3 paires de chaussettes en laine (marque Smartwool)
  • 1 caleçon court pour la nuit.

Cela semble peu, en fait ce fut largement suffisant, j’en emmènerais moins l’an prochain.

Quelques remarques sur la météo :

Le froid n’est pas un souci dans ces îles en été. J’avais emmené mon compteur qui ne m’a servi qu’à faire des relevés de températures et d’altimètre comme baromètre : il faisait au plus froid 11°C le matin (une seule fois 10) et le plus souvent 15°C l’après-midi, pratiquement jamais au dessus de 17°C. Une température idéale pour rouler : je n’ai quasiment jamais ressenti le besoin de me couvrir les jambes.
Le vent rend les choses compliquées.  Il est toujours très présent, il est parfois dangereux de rouler (ou de planter la tente). Mais les écossais sont tout à fait courtois au volant, ils sont attentifs aux autres et connaissent le problème des écarts liés aux rafales.
La pluie
est vraiment LE problème majeur. J’y ai eu droit dès le départ pendant plusieurs jours d’affilée, et j’ai très vite compris qu’il fallait préserver l’essentiel (le haut du corps) et surtout ne pas essayer de garder le reste au sec. Les gants de vélo trempés pourrissant au fond du sac et finissant à la poubelle après deux jours de voyage m’ont tout de suite servi de leçon. La peau sèche vite, ce n’est pas le cas des vêtements.

Je me suis arrêtée dès le premier soir après une journée complète de pluie en ayant cerné l’essentiel : rouler complètement au sec dans de telles conditions de pluie et de vents violents est illusoire. Remettre des vêtements humides pour repartir le lendemain est envisageable. A contrario, installer la tente le soir sans avoir de vêtements secs à disposition pour se réchauffer, ne l’est pas.

J’ai donc immédiatement banni tout ce qui n’était pas indispensable  :

  • les jambières (jamais mises sur le vélo mais utiles pour se réchauffer sous la tente ou dans les ferries)
  • les gants (poubelle …)
  • le pantalon imperméable (la galère à faire sécher et jambes nues en roulant on a pas froid)

Le haut du corps était relativement bien protégé par l’imperméable D4, je gardais mon cuissard le plus longtemps possible le soir pour le sécher.

Pour dormir je me faisais un matelas de mes vêtements humides. Le lendemain matin j’ai parfois un peu grincé en mettant le bas (toujours très soigneusement et longuement nettoyé avec des lingettes) mais une fois posées les fesses sur la selle c’était oublié.

Par contre comment réussir à sortir de la tente  pour vérifier que les piquets tiennent au vent et surtout pour aller faire pipi sous la pluie alors qu’enfin on est sec ?  L’astuce du siècle c’est le … PARAPLUIE ! … J’en ai trouvé un petit mais résistant dans la première boutique venue, il a fait mon délice toutes les vacances !

Il restait le gros point noir : les chaussures ! J’avais été particulièrement inspiré en arrimant ces affreux mais si légers et confortables après-ski D4 sur le porte-bagages. En plus d’être chauds, ils sont waterproof et m’ont permis plus d’une fois d’éviter de me mouiller les pieds quand les chemins se perdaient dans les tourbières.

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C’était un délice de les enfourner le soir et de pouvoir vaquer les pieds au sec et au chaud, mais le premier matin venu, il m’a bien fallu refourguer mes pétous frileux dans mes baskets trempées : tout problème a sa solution, je faisais chaque jour des courses (sauf le dimanche où même les balançoires sont enchaînées sur ces îles …) et jamais on ne m’a refusé de vieux journaux. Chaque fois que nécessaire, ils ont séché mes chaussures, ils m’ont aussi servi de plastron un jour de petit matin particulièrement glacé.

La liste ne serait pas complète sans ces ustensiles qui se sont révélés rapidement incontournables dans ce gaélique environnement :

  • des élastiques : de bêtes bracelets en caoutchouc pour interdire l’eau de rentrer au poignet. J’ai aussi utilisé un cordon élastique en tissu pour fermer hermétiquement le col de ma veste.
  • une casquette, je l’ai vissée sur mon crâne  le premier jour (sous le casque évidemment), je ne l’ai enlevée que pour dormir. Elle m’a protégé du soleil comme de la pluie.
  • La couverture de survie s’est vite révélée indispensable. Si en roulant on n’a jamais froid, on grelotte facilement lorsqu’on s’arrête. Pique-niquer à midi dans un abri-bus au milieu de nulle part perdue dans la lande écossaise enroulée dans sa couverture de survie est un des petits bonheurs de la vie …

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J’ai aussi rencontré quelques surprises : ma veste de vélo D4 imperméable a été acquise il y  plus de 10 ans, je l’ai payé 3 francs 6 sous , je ne l’ai pas toujours traitée comme il faut, elle s’est révélée une alliée primordiale et jamais prise en défaut. Inversement, j’ai testé il y a 3/4 ans pour un webzine une veste Raidlight hors de prix  (169 €)  – et heureusement je ne l’ai pas payée ! – mais que toujours  j’ai traité avec soin (peu de lavages et toujours à la main). Elle s’est révélée plus que lamentable ! Imperméabilité absolument nulle au-delà de quelques dizaines de minutes, elle « pompe » littéralement l’eau !…

Un mot concernant la propreté : il est facile de rester propre en Écosse : chaque village, chaque port a des toilettes où il est aisé de se laver, de faire sa petite lessive et parfois même de prendre une douche. Le vent souvent est un allié : il suffit d’un rayon de soleil et de quelques pinces à linge pour que tout soit sec. Malgré tout, la pluie ne permet pas toujours d’étendre le linge. Dans les cas où je ne peux laver mes vêtements d’un jour sur l’autre, j’utilise alors des lingettes pour les fonds de cuissards. ce qui me permet de pouvoir les remettre le lendemain : à la guerre comme à la guerre …

J’ai été surprise d’avoir si peu d’ajustement textile à faire pour ma prochaine escapade. Pour la prochaine fois j’aurais à rajouter :

  • une casquette (à faire moi-même) style légionnaire (avec une protection amovible en tissu qui couvre le cou et un cordon qui permet de la mettre même en plein vent) si possible imperméable.. Ma veste D4 n’ayant pas de capuche les balades à pied (il m’est arrivé de planquer mon vélo dans un coin pour partir en vadrouille sans lui) n’en seront que plus agréables !
  • une moustiquaire de tête (que je compte faire aussi moi-même). Les midges (sorte de moucherons particulièrement féroces) passent à l’attaque dès que le vent tombe. Il est plus agréable et plus rapide d’enfiler une moustiquaire que de se tartiner le museau.

Par contre concernant l’équipement et surtout les astuces pour le vélo, j’ai beaucoup plus de choses à bidouiller, mais cela fera certainement l’objet d’un nouvel article …

Marie

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