L’Everest Challenge, ou « everesting », consiste à gravir l’altitude du Mont Everest (8 848 m) sur la montée de son choix, en la répétant autant de fois que nécessaire. Des cyclistes arlésiens du CALD (Cyclistes Arlésiens Longue distance), ont profité du solstice d’été pour tenter l’expérience aux Baux de Provence, dans les Alpilles.
Un récit de Frédéric Ferrand et des photos de Pascal Colomb.
C’est au cours d’un « Mardi c’est Fixie », la sortie hebdomadaire de pignon fixe à Arles, que j’ai pour la première fois entendu parler de l’Everest Challenge. J’avais du mal à analyser ce que m’expliquait Dan de Rosilles. En somme, il s’agissait de couvrir le dénivelé de l’Everest en multipliant les montées et descentes d’un même versant de colline.
C’est la montée de la Route des Baux, sur la face nord des Alpilles, qui a été choisie pour ce faire.
Cette ascension se partage en 3 parties, sur une distance totale de 6,1 km : un long faux-plat montant de 3,5 km, une série de beaux virages à 6% de moyenne pendant 1,8 km, puis une dernière rampe jusqu’à la table d’orientation de Baumayrane où, sur 800 m, les pourcentages frôlent les 9% par endroit.
Le tout pour un dénivelé de 240 mètres, qu’il conviendrait de grimper 37 fois, pour avoir l’équivalent de la montée sur l’Everest. Pour les cyclistes de tous niveaux qui avaient été conviés, il était prévu également des paliers intermédiaires, genre atteindre le niveau du Mont Ventoux (Ventouxoir – 1909 m), par exemple, ou celui du Mont-Blanc (Montblanchir 4696 m), mais le but ultime était l’Everest.
Bien entendu, je ne connaissais personne ayant personnellement entrepris pareille folie. Autour de moi, les gens à qui j’en parlais, restaient bouchée bée, avant de déclarer que c’était dingue. Le jour approchait. Le samedi 20 juin 2020, on était sur place. J’avais compris que je retrouverais ici de vieilles connaissances, comme Jean-François, Akim, Anne et Dan bien sûr. Mais j’ai découvert aussi pas mal de nouvelles têtes sur la route de l’exploit, car c’était bien une quinzaine de cyclistes qui s’étaient élancés et maintenant roulaient joyeusement, montant, descendant, se croisant sans cesse.
OK. J’ai grimpé presque tout en haut des Baux, c’était aussi ardu que d’habitude, mais le Mistral dans le dos aidait grandement à l’avancée. J’ai fait demi-tour dans la pente et je me suis placé devant un duo, afin de prendre le vent. Je venais en touriste, eux allaient rouler longtemps, autant servir d’équipier. Les cyclistes étaient gentils, fraternels et tous souriaient en se saluant au fil des montées et descentes. Il faisait doux, le vent nous berçait, c’était un magnifique moment annonçant l’été.
J’ai laissé mes compagnons de grimpette à regret, mais grâce à Jean-François – toujours le bon mot même à vélo – j’avais trouvé le nom de ma bien modeste sortie. « Il s’agit de monter et de redescendre … », m’avait-il lancé dans l’ultime et affreuse rampe menant à la table d’orientation. Bien résumé … Programme simple, mise en application délicate. J’avais réalisé 3 montées, autant de descentes. Je pouvais rentrer à Arles. Les plus endurants en auraient encore 34 à répéter.
Le lendemain, sitôt rentré d’un vide-greniers, je sautais sur mon vélo et filais aux Baux. Le temps avait changé. Le mistral s’était renforcé et surtout il faisait chaud, la journée s’annonçait brûlante. Après 20 kilomètres de vent pleine poire, j’arrivais au pied du Val d’Enfer. Pas un cycliste en vue. Sur le parking où les participants à l’Everesting s’étaient garés, plus une voiture. Mince, ils ont déjà terminé, m’étais-je dit en martyrisant mon Vitus 2006 tout couinant.
Puis je les ai vu. Dans les derniers lacets conduisant au sommet, ils étaient deux. J’ai assez vite reconnu Dan, sur son Fonlupt Équipe vintage, mais j’étais interloqué par son compagnon. Celui-ci chevauchait une énorme moto BMW grise. Quand j’ai fini par les rattraper, sur la fracassante section menant à la table d’orientation, j’ai compris que Dan était rincé, qu’il n’avait pas fermé l’œil (il était parti la veille à 17 h, et il était 11 h) mais qu’il n’allait rien lâcher. Roch, son sympathique accompagnateur, après avoir gravi plus de 2000 mètre de dénivelé la veille, était revenu en moto pour l’encourager.
Dan s’est posé un moment. La nuit s’était bien passée, mais un rapide calcul établissait qu’il lui restait encore une dizaine d’ascensions, et autant de descentes, avant d’en terminer. Aucun découragement, juste l’évidence de l’effort à venir et celle du temps qui s’écoule sans merci. Ensemble, nous avons pris la descente, je suis passé devant et il s’est mis dans la roue. En bas, je lui ai donné l’eau de mon bidon. Biens modestes contributions à son challenge, mais qui visiblement lui ont donné du courage. Je suis reparti confiant, je savais qu’il y arriverait.
En fait, nous y sommes tous arrivés. Car cette invitation du CALD à se dépasser, a été pour nous tous une expérience nouvelle, une source d’inspiration pour aller plus loin, plus haut. Certains n’ont fait que quelques montées, d’autres sont restés toute la nuit. Thierry Saint Léger, par exemple, a gravi l’équivalent du Mont-Blanc dans la nuit en pignon fixe 42 x 17, avant de repartir à Florac au petit matin. La jeune Marjolaine, en pignon fixe elle aussi et ne pratiquant le vélo que depuis quelques mois, a réussi à gravir 947 m, l’altitude du Mont Bayard dans le Jura, en 46 X 16 ! IL y a des montagnes de toutes altitudes, à chacun de gravir la sienne.
À chacun son Everest…
Liens externes :
Le club Strava des cyclistes du CALD
Le compte Instagram de Pascal Colomb
La boutique en ligne de vêtements vintage de Frédéric Ferrand