Je vous avais présenté succinctement le travail d’exception réalisé par Lorie et Valentin du Garde Boue des Bois dans l’article Sélection du Bike Café d’avril dernier. Une présentation plus en détails s’imposait.
Hasard de la vie ? En ce qui concerne le vélo, je n’y crois pas trop. Je vous passe les détails, mais suite à mon test et article sur le vélo en bois de frêne Sila Cycles, j’ai découvert et rencontré à plusieurs reprises les artisans créateurs de Le Garde Boue des Bois et j’ai eu l’occasion d’échanger et tester leurs accessoires en bois. Depuis quelques mois, on sent que ce matériau intéresse de plus en plus l’univers du vélo. Et ce n’est pas un hasard, car il a de réelles et nombreuses qualités : beau, local, léger, résistant, recyclable, disponible.
Et l’histoire de la petite reine a commencé avec et grâce à lui. Le bois était utilisé à la naissance du cycle, il y a plus de deux siècles, puisque l’ère industrielle et le travail des métaux n’en étaient qu’à leurs balbutiements. Au niveau des accessoires, on retrouvait donc des garde-boues, des jantes ou bien encore des pédales en bois. Les techniques anciennes pour fabriquer ces accessoires étaient assez rudimentaires et ces derniers ont peu traversé les époques, supplantés ensuite rapidement par les accessoires en métal puis en plastique. Il est donc rare de trouver encore des garde-boues en bois en bon état de conservation et de fonctionnement.
Il existe encore de nos jours des productions industrielles et plus rarement artisanales d’accessoires en bois pour vélo, plus présentes dans l’univers du vélo vintage, du fixie et du vélo de ville.
La réalisation d’accessoires en bois techniques, performants et durables nécessite une conception et un savoir-faire important. Grâce à ces qualités, ces accessoires ont certainement leur place aussi dans l’univers du gravel et du vélo de voyage.
Valentin et Lorie sont partis de ces constats pour développer leurs accessoires en bois qu’ils définissent : pratiques, techniques, performants et élégants.
Les créateurs et l’esprit du Garde Boue des Bois
Lorie Nicolas, 26 ans et Valentin Chauvreau, 28 ans, ont déjà un solide parcours dans l’univers du bois. Lorie, après un baccalauréat en Arts Appliqués se forme aux techniques d’ébénisterie, de tournage et de marqueterie. Elle intègre le Lycée François Mitterrand à Château Chinon, un lycée d’excellence reconnu pour sa formation en ébénisterie, art du bois et même lutherie. Elle y rencontre Valentin qui a intégré ce même Lycée après un BEP des métiers du bois, un CAP ébéniste et un brevet de métier d’art. Ils se spécialisent dans la sculpture, la marqueterie et le tournage du bois en travaillant pour des maisons et des clients de prestige en copie de mobilier ancien et tabletterie de luxe avec par exemple la réalisation d’échiquiers sur mesure et unique.
Après quelques années de travail en entreprise, basée au pied du Vercors, ils désirent voler de leurs propres ailes et mûrissent un projet d’installation. Ils se forment à la gestion des PME. Lorie avait entre-temps passé un diplôme de Webdesigner et travaillé dans ce domaine ce qui se retranscrit dans la qualité du site internet créé et la communication. Ils s’installent donc au pied du Vercors en trouvant la maison et l’atelier de leurs rêves qu’ils vont aménager pendant le confinement et lance leur activité dans les Arts du Bois : ébénisterie, marqueterie, sculpture et tournage en créant l’entreprise Valmin Lorey.
Valentin retape un vélo pendant le premier confinement et cherche naturellement à l’équiper de garde-boue en bois. Il fouille pour voir ce qui existe mais ne trouve que des garde-boues à profil plat. Lorie et Valentin se disent qu’ils préféreraient avoir des garde-boues au profil bombé. D’une part c’est la forme logique techniquement pour évacuer et canaliser au mieux l’eau et d’autre part ce serait beaucoup plus design. Lorie réalise l’étude de faisabilité et le couple réalise des prototypes. Un garde-boue peut paraître un accessoire simple à première vue mais le fait de le réaliser en bois et donner une forme arrondie et bombée est un sacré challenge et une véritable innovation technique. En effet, le bois est un matériau complexe nécessitant de nombreuses connaissances et un grand savoir-faire. Chaque bois est différent, il « travaille » et se travaille selon des critères très précis. Ils réussissent ce challenge et lance leur activité d’accessoires en bois pour vélo en créant Le garde Boue des Bois en 2021. Leur histoire était en marche.
Lorie et Valentin se définissent comme des Cyclo-Tabletier. La tabletterie est la fabrication de petits objets très soignés en bois par découpage, assemblage, formage, moulage, marqueterie et incrustation et sculpture. C’est donc cet art du bois appliqué à la bicyclette.
Ils définissent leurs réalisations comme : pratiques, performantes, élégantes et apportant une touche de personnalisation.
Voici la présentation de leur exceptionnel travail artisanal.
Le sourcing du bois
Lorie et Valentin puisent une majorité de leur matière première au cœur de stocks de bois anciens dormants, ce qui présente un double intérêt : revaloriser cet élément parfois oublié dans des anciens ateliers d’ébénisterie depuis plusieurs dizaines d’années et travailler à partir d’un matériau de bien meilleure qualité.
Composés à partir d’éléments majoritairement français sinon européens, leurs accessoires sont constitués de bois revalorisé laminé (95%), de résine de synthèse origine France (4%) et de finition naturelle d’origine européenne (1%). Le frêne et le noyer sont les deux essences principales utilisées pour leurs qualités de résistance et de légèreté.
Les accessoires proposés
Lorie et Valentin proposent des accessoires en bois au travers d’une gamme qui va certainement s’agrandir dans les mois à venir.
Les garde-boues
Comme dit en introduction, le procédé mis au point est novateur pour réaliser ces garde-boues bombés en bois. Le brevet a d’ailleurs été déposé par Lorie et Valentin.
Dans les grandes lignes, les étapes de fabrication sont les suivantes :
- Sélection et débit des bois qui composent les garde-boues. Les défauts sont éliminés pour obtenir la meilleur qualité mécanique et esthétique ;
- Découpe et mise en forme sur moule pour façonner les courbes du garde-boue qui sont composées de plusieurs et différentes couches de bois assemblées à la résine. Les traits de courbe sur le garde-boue ne sont pas réalisés par hasard. Ils ont été calculés pour pouvoir réaliser la courbure et la forme bombée et pour éviter leur déformation dans le temps ;
- Temps de repos indispensable à l’obtention des caractéristiques mécaniques optimales ;
- Mise à dimension et finition des garde-boues effectuées à la commande selon les options de tailles choisies.
Quatre modèles sont au catalogue.
La finition est à base d’huile écologique haut de gamme qui résistera aux attaques de l’eau et des UV.
La souplesse des garde-boues permet de les adapter pour des roues de 26 pouces à 29 pouces. Et ils sont disponibles en deux largeurs, 45 et 55 mm. Le poids de la paire hors fixations est de 160 à 210 g en fonction des tailles.
Au niveau des fixations, un kit sobre et élégant est disponible en option. Pour les avoir montés sur le Sobre Versatile, l’opération s’est déroulée sans accroc mais il faudra bien valider la compatibilité de votre fourche et votre cadre. Monter et adapter un garde-boue n’est pas toujours chose facile et nécessite souvent des adaptations. Sur mon gravel Niner la forme de la fourche ne permet pas d’adapter un garde-boue par exemple.
L’entretien est simple à réaliser. Frottez avec une éponge côté Scotch Brit puis appliquer l’huile au chiffon. La nécessité d’entretien et sa fréquence dépendront de différents critères : intensité d’utilisation, conditions d’utilisation, stockage etc.
Le prix de la paire est de 180 € ce qui est certes un prix haut de gamme mais en rapport avec le travail artisanal réalisé nécessitant de nombreuses heures de fabrication et un grand savoir-faire.
Les porte-bidons
Le porte-bidon a été étudié pour des bidons de 62 à 85 mm ce qui vous permettra d’y loger des bouteilles de grande contenance si besoin. Le serrage via la lame de ressort en frêne a été parfaitement étudié pour la tenue de tous ces diamètres. Vos bidons ne bougeront pas.
Le prix est de 95 €.
Les bouchons de cintre
Ils sont également extrêmement bien étudiés et existent en quatre finitions. Leur fabrication nécessite une douzaine d’étapes. L’expanseur est en liège de France tout comme le bois de frêne ou de noyer qui les compose.
Le prix est de 35 €.
Pour conclure
Le renouveau de l’artisanat français du vélo depuis quelques années fait plaisir à voir. Lorie et Valentin conçoivent des produits techniques, performants et design avec une démarche globale intéressante et vertueuse, depuis le sourcing en passant par la fabrication jusqu’à la commercialisation ; avec des prix, certes haut de gamme, mais maîtrisés en rapport au temps passé, à la technicité des produits réalisés et à l’originalité apportée. Le design et le choix des modèles seront une affaire de goût et dépendront des montures à équiper.
Le bois entre peu à peu dans cet univers du vélo en perpétuel mouvement. Il peut trouver sa place je pense grâce à ses nombreuses qualités. Charge aux créateurs de le faire connaître et le faire tester pour tordre le cou à certaines idées reçues à son sujet.
Saluons ce travail d’exception qui apportera une touche certaine à votre vélo avec une conception, une composition et une fabrication 100% françaises, assez rare pour le souligner. Les deux cyclo-tabletiers ont plus d’un tour dans leur musette et débordent d’idées. De nombreux projets très intéressants et novateurs sont en développement. A suivre au Bike Café…
Toutes les informations sur le site Le Garde-Boue des Bois