Encore un gravel en titane ? Il y a à peine 10 ans, les gravel en titane étaient rares, dispendieux, et suscitaient l’admiration. Depuis, ce métal continue d’attirer toujours plus d’amateurs. Au point que les artisans français historiques ne sont plus les seuls, loin de là. Des investisseurs l’ont bien compris et l’offre de vélos en titane est désormais aussi nombreuse que variée. Mais CMT fait partie intégrante de l’histoire des vélos français en titane. Aussi, je m’estime chanceux d’avoir pu rouler le CMT Gravel CX durant 1092 km, sur les surfaces les plus variées et les dénivelés les plus contrastés.
CMT : une histoire française
Fondée en 2000, CMT est une entreprise basée en Haute-Savoie qui fabrique désormais ses cadres en titane dans ses propres locaux. Artisans engagés, je vous encourage vivement à lire l’article et/ou écouter le podcast pour découvrir l’histoire de la marque CMT (Cycles Matériau Technologie devenue Custom Made Titanium) :
CMT Gravel CX : conception
Entièrement fabriqué en France, le cadre du CMT Gravel CX affiche une conception relativement classique. Pour autant, un examen plus approfondi laisse apparaitre une finition de premier ordre.
Les soudures, discrètes, sont d’une régularité irréprochable. Les marquages sont réalisés par un processus d’anodisation. Ensuite, les cadres CMT reçoivent un traitement microbillé, appliqué manuellement à l’aide d’une sableuse haute performance.
Ce procédé de traitement de surface par micro-martelage permet d’obtenir cette teinte satinée. Puis, un traitement céramique spécifique est appliqué à la main. Grâce à ce processus, je note que le rendu final est à la fois simple et valorisant.
En premier lieu, le triangle avant se compose de tubes de titane Grade 9 (Ti-3Al-2,5V) découpés au laser par un sous-traitant local, situé à 15 km de l’atelier. Là-dessus, top tube et tube oblique se rejoignent sur une douille droite qui participe à l’élégance naturelle de ce cadre. Enfin, tube de selle et tube oblique ferment ce triangle sur un boitier de pédalier fileté BSA réalisé en titane Grade 5 (Ti-6Al-4V).
Le yoke, signé CMT, permet de joindre les bases au boitier de pédalier. Un élément réalisé par impression 3D, en titane. Cette pièce a été conçue en interne, en CAO. D’ailleurs, la première version date de 2017, faisant de CMT un des précurseurs de ce procédé. Quant au triangle arrière, celui-ci est usiné et cintré à la main. D’ailleurs, le dessin des haubans rappelle certaines réalisations de chez Dedacciai.
Ce cadre nu pèse 1765 g en taille M (sans la fourche). Par ailleurs, l’intégration des gaines est presque totale, favorisée par le groupe électronique qui équipe mon exemplaire. Seule la durite hydraulique du frein arrière se découvre sous le boitier de pédalier.
Concernant la fourche, c’est une réalisation Deda Elementi, nommée Gera EDG, intégralement en carbone. Elle colle parfaitement à l’esprit sportif du CMT Gravel CX, notamment grâce à des angles vifs qui viennent trancher avec les sections rondes des tubes du CMT.
Tout comme le cadre, son dégagement permet une monte pneumatique maximale de 45 mm en roues de 700. De plus, elle permet le passage d’un câble de moyeu dynamo. Enfin, son déport est de 50 mm et son poids de 498 g.
Géométrie du CMT Gravel CX
La géométrie est optimisée pour des roues de 35 à 40 mm. Une géométrie globalement assez classique, avec tout de même un penchant pour le dynamisme et l’agilité, notamment avec un angle de direction de 71,5°. Cependant, le centre avant (distance entre l’axe de pédalier et l’axe de roue avant) est dans le haut de la moyenne, avec pour conséquence un empattement conséquent, propice à apporter de la stabilité.
Équipements
CMT a pour habitude de favoriser un dialogue constant avec ses clients, souvent sur plusieurs mois, avant de définir ensemble la configuration finale. Comme nous allons le voir, mon exemplaire de test est richement doté, en toute cohérence avec le positionnement haut de gamme du kit cadre.
Groupe SRAM Red AXS XPLR
La transmission et le freinage sont issus du groupe électronique Red AXS XPLR de SRAM (version 2023), qui s’articule autour d’un unique plateau de 40 dents et d’une cassette 12 vitesses 10-44 dents de la gamme Force XPLR. Le freinage est typique de chez SRAM, à savoir progressif et facilement dosable. Mention spéciale au revêtement des cocottes, de loin le plus confortable de toute la gamme SRAM. Les disques flottants Hope apporte une touche sportive réussie. Détail intéressant : ces disques sont dotées d’un bord extérieur usiné “rond” pour la sécurité et pour faciliter le changement de roue (deux aspects intéressants en compétition).
Roues et pneus
Le train roulant, assuré par les Campagnolo Levante, colle parfaitement à l’esprit sportif du CMT Gravel CX. Leur hauteur (30 mm) et largeur interne (25 mm) sont totalement en adéquation avec une pratique dynamique et variée du Gravel. Avec des jantes qui en carbone, ce set pèse autour de 1485 g. Notons qu’elles sont de conception Mini-Hookless, qui est un concept Campagnolo censé réunir le meilleur des deux mondes (avec ou sans crochet). Quant à la monte pneumatique, c’est Pirelli qui équipe ce vélo, avec des Cinturato Gravel H tressés en 60 tpi et de dimensions 700×40 mm.
Périphériques
Tout comme la fourche, la marque Deda signe les périphériques. Ainsi, on retrouve sous les mains un cintre en carbone Superzero, maintenu par une potence Superbox en aluminium 6061, équipée de son support de compteur.
Sous les fesses se trouve une selle SMP VT30, fixée sur une tige de selle en carbone, signée Deda. La finition des périphériques Deda est exemplaire. Quant au jeu de direction, c’est Hope qui apporte une nouvelle fois une touche bleutée sportive.
Enfin, pour finir cette présentation, j’ai pesé ce CMT Gravel CX en taille M à 8,65 kg, incluant les deux porte-bidons.
Le CMT Gravel CX sur le terrain
Le mont Ventoux, le massif des Maures, mais aussi les berges de la Durance, l’Eurovélo 8 et la Via Venaissia furent les terrains de jeu pour caractériser ce CMT Gravel CX. Sur ces surfaces aussi variées que leurs paysages, j’ai parcouru 1092 km sur un dénivelé non négligeable. Dans ces conditions, mes sorties sont majoritairement dynamiques, s’échelonnent de 3 à 8h00, dont la plus longue est une sortie de 203 km multi surfaces :
Du confort
Premièrement, je n’ai pas posé mon séant sur une selle SMP depuis 2019, lors du test du Look 765RS Gravel dans le Sancerrois. Cela étant dit, une fois bien réglée, la selle SMP VT30 est un atout précieux pour mon bien-être. Mais ce n’est pas le seul élément confortable du CMT Gravel CX, loin de là. En effet, je constate rapidement les exceptionnelles qualités de filtration qu’offrent ce cadre. Cette sensation devient véritablement un fait au fil des kilomètres de mon test. Malgré des bases aux côtes sportives (425 mm), le CMT semble en suspension sur les imperfections de la chaussée.
Le triangle arrière travaille parfaitement et permet, d’une part d’apporter du confort à son hôte, et d’autre part de conserver le contact avec le terrain. Une caractéristique cruciale sur nos montures rigides. Là où certains tressautent, le CMT Gravel CX absorbe. En conséquence, du confort, mais aussi, de la vitesse !
Rendement, ou l’efficience du CMT Gravel CX
Pour le Trésor de la Langue Française Informatisé, l’efficience est “l’aptitude d’une machine, d’une technique, d’une personne ou d’une entreprise à fournir le meilleur rendement”. Autrement dit, l’efficience est l’optimisation de la consommation des ressources utilisées dans la production d’un résultat. Dans le cas de notre pratique, c’est le rapport entre la puissance musculaire investie et le résultat qui s’exprime en vitesse. Partant de ce fait, ce vélo CMT en est la parfaite illustration : “rien ne se perd, tout se transforme” (Antoine Lavoisier).
La force tranquille
Non, le CMT Gravel CX n’est pas spectaculaire dans sa capacité d’accélération. Mais plutôt dans sa capacité, au fil des sorties, à abattre subtilement vos PR sur Strava. Et cela, même en comparaison de vélos plus légers, qui sont sur le papier, plus redoutables aussi. Preuve est-il encore une fois que la performance d’un vélo ne peut s’exprimer qu’en résultante d’une multitude de facteurs. Les concepteurs de ce CMT ont parfaitement intégré cette dimension globale.
Sur le bitume, ce rendement s’exprime de belle manière. La position est aérodynamique, mais sans excès. Aussi, même chaussé de pneus de 40 mm, je n’ai aucun mal à imprimer un bon rythme sur un parcours mixte menant au sommet du mont Ventoux :
Il serait injuste de ne pas inclure les roues dans les acteurs de cette équation gagnante. Les Campagnolo Levante sont un atout majeur au sein de ce montage CMT. Dynamiques à souhait, elles brillent d’une polyvalence impressionnante. Aussi à l’aise dans les ascensions que pour imprimer de grosses moyennes sur le plat, je suis impressionné par leur comportement.
Dans les descentes, l’empattement généreux permet une belle stabilité, propice à mettre en confiance son pilote, qui peut ainsi s’inscrire rapidement dans les courbes.
Pour autant, le CMT Gravel CX reste agile et même joueur, grâce à un excellent compromis dans sa géométrie. Les lettres CX de son nom de baptême sont donc légitimes.
Quelles évolutions souhaiter à ce CMT Gravel CX ?
Parler de véritables défauts sur ce vélo serait compliqué, tant sa rigueur de conception et sa réalisation sont remarquables. Je préfère évoquer des évolutions qui me semblent souhaitables. En premier lieu, rendre le cadre compatible avec le standard UDH. Ceci afin d’accepter les toutes dernières transmission SRAM. Jean-Pierre Ramoul m’a confirmé que c’était en cours de conception, comme le montrent ces clichés dévoilant des évolutions futures. La question d’un troisième emplacement pour porte bidon mérite d’être posée. Enfin, une boite de pédalier plus généreuse permettrait peut-être d’intégrer la gaine hydraulique du frein arrière.
Pour conclure
Vous l’avez compris, j’ai été emballé par ce vélo. Non pas parce que celui-ci est certifié “Origine France Garantie”. Non, à mes yeux, ce n’est pas suffisant pour convaincre, à fortiori pour un vélo destiné à une clientèle sportive qui, tout comme moi, procède à des choix rationnels, et où l’efficience, comme je l’ai développé, tient un rôle central dans la décision finale. Mais tout simplement parce que le CMT Gravel CX réussit la synthèse parfaite de ce que j’attends d’un vélo à connotation sportive Gravel Race. Pour autant, sa fabrication artisanale en France ne me laisse pas indifférent. Finalement, elle me rassure sur la capacité de nos fabricants à côtoyer l’excellence, et à savoir se renouveler. CMT n’est probablement pas le seul dans ce cas, mais son modèle Gravel CX est une véritable démonstration de son savoir-faire dans ce domaine.
- Prix du kit cadre : à partir de 3000 € (garanti à vie)
- Prix en vélo complet : à partir de 6000 €
- Prix du modèle testé : 9700 €
- Page fabricant : Cadres et Vélos Titane fabriqués en France (cmt.bike)
Caractéristiques CMT Gravel CX
TAILLES | XS, S, M (taille testée), L, XL ou “sur mesure” |
CADRE | CMT Titane |
FOURCHE | Deda Gera EDG |
JEU DE DIRECTION | 1-1/8 HOPE |
POTENCE | Deda Superbox DCR, taille 100 mm |
CINTRE | Deda Superzero Gravel Carbone, taille 44 cm |
TIGE DE SELLE | Deda Superzero Carbone |
SELLE | Selle SMP VT30 Gel |
MANETTES | SRAM Red AXS |
ÉTRIERS DE FREIN | SRAM Red AXS |
DISQUES | HOPE Road de 160 mm Centerlock (avant et arrière) |
DÉRAILLEUR ARRIÈRE | SRAM Red XPLR AXS, 12 vitesses |
CASSETTE | SRAM Force XPLR, 10-44 dents, 12 vitesses |
CHAÎNE | SRAM Red, 12 vitesses |
PATTE de DÉRAILLEUR | CMT (UDH à partir de 2025) |
PÉDALIER | SRAM Red, 40 dents (manivelles en 172,5 mm) |
BOÎTIER DE PÉDALIER | SRAM DUB, format BSA/BSC 68mm |
ROUES | Avant : Campagnolo Levante, axe 12×100 mm Arrière : Campagnolo Levante, axe 12×142 mm, corps de roue libre XDR |
AXES TRAVERSANTS | Avant : 12 x 100 mm Arrière : 12 x 142 mm |
PNEUS | 700×40 mm Pirelli Cinturato H |
ACCESSOIRES | Portes bidons CMT en titane, chargeur de batterie SRAM AXS |
Merci pour ce test très complet qui vient confirmer mes premières impressions.
Ce vélo est tout simplement une pépite. Lors des premiers tours de roues, c’est vraiment le côté “absorbant” du cadre qui impressionne, comme c’est si bien expliqué dans votre article. Pourtant la réactivité est tout de même au rendez-vous, c’est un plaisir de se mettre en danseuse et de sentir ce vélo nous répondre directement.
Pour avoir également pu essayer la version route, je garantie que ces vélos CMT ont toute leur place en compétition comme en loisir. Leurs polyvalences sont tout bonnement incroyable !
Bonjour Axel, merci pour votre commentaire, qui apporte également des arguments intéressants. Merci de nous lire et à bientôt.
Un grand merci, du super matos ce vélo !
J’ai vécu une semaine merveilleuse sur le challenge de la Tourmagne, de Melun à Nîmes.
Pas une compétition, mais un 950km de petites routes avec les plus gros raidards possibles et un tiers du parcours en Gravel
Avec des passages bien caillouteux.
Ce fut un bonheur. Aucune douleur, super confort.
Vélo qui tient la route dans des descentes rapides bourrés de caillasses idem en faisant des fautes dans la boue, ça ne bouge pas malgré les 12kg embarqués ( eau comprise + sacoche photo)
Bonjour Eric, merci pour ce témoignage. Une belle aventure d’après votre récit 😉 Merci de nous lire et à bientôt.