Faisant fi de mon âge avancé (je suis né au XXème siècle, à une époque où les systèmes de guidage par satellite n’existaient pas) et tentant d’outrepasser l’usage basique et minimal que j’ai des appareils numériques, j’ai testé pendant deux mois sur les routes des Alpilles (et d’ailleurs) le GPS Lezyne Mega C, un modèle certes bon marché, mais ultra-connecté. Voici un retour d’expérience qui, je l’espère, vous permettra de déterminer si cette petite machine, parmi une offre de plus en plus large, est adaptée à votre pratique cycliste.
Le principe de base
Avec son Mega C (C pour “couleurs”), Lezyne a visiblement l’ambition de proposer une solution GPS complète, mais à un prix très en deçà de ce que proposent ses concurrents, en particulier l’américain Garmin, leader dans le domaine du GPS. Pour résoudre cette équation paradoxale, c’est le smartphone du cycliste, appairé au GPS, qui contribue aux fonctions avancée, le GPS se faisant le relai d’informations qui lui sont transmises par le smartphone.
Voilà qui a été assez déstabilisant pour moi, même si désormais la plupart des autres marques font elles aussi communiquer smartphone et GPS avant, pendant et après la sortie. Mais j’étais jusqu’alors équipé de GPS “anciens” (3 ou 4 ans, une éternité dans le monde du high tech !). Ma routine était bien installée : je connectais GPS et ordinateur pour transférer cartes, itinéraires, activités avant et après la sortie, mais utiliser le smartphone via Bluetooth pendant le ride, a été pour moi une véritable révolution conceptuelle.
Honnêtement, j’ai mis un moment à m’y faire. En découvrant l’appareil, j’ai réalisé qu’il était tributaire du smartphone ; jusqu’à quel point ? Le problème est, que la réponse est forcément floue, puisque… ça dépend pourquoi, et ça dépend des fois. J’ai donc assez rapidement renoncé à comprendre les méandres de la relation entre le smartphone et le GPS, et je me suis plutôt attaché à intégrer les différentes étapes nécessaires au bon fonctionnement du Mega C pour le rendre opérationnel lors de mes sorties vélo.
L’application GPS Ally App
Première chose à faire, télécharger l’application Ally v2 (gratuite) disponible aussi bien sous Android que IOS. Pour résumer les usages essentiels, celle-ci permet :
1) De finaliser l’appairage entre GPS et smartphone. Ces deux-là se reconnaissent via le protocole Bluetooth, et le smartphone connecté au web (via 3G ou 4G) peut ensuite envoyer des informations au GPS : itinéraires, guidages, mais aussi notifications de SMS, de réseaux sociaux…
2) De régler et configurer le GPS. On peut bien sûr aussi le faire directement sur l’appareil lui-même, via des menus en arborescence très simples et intuitifs, mais certaines fonctions, comme la configuration des pages de données par exemples, ne sont accessibles que depuis l’application. J’ajoute que le GPS n’a pas d’écran tactile mais quatre boutons sélecteurs à clic, donc l’interface du téléphone est beaucoup plus fluide que celle du GPS pour effectuer réglages et configurations.
3) D’envoyer en temps réel des données au GPS : cartes, itinéraires, données pour du recalcul de routes etc… “en temps réel” veut dire aussi qu’il faut non seulement envoyer un itinéraire au GPS avant de clipser sa seconde pédale si on veut être guidé, mais que pendant la sortie le GPS est susceptible d’avoir besoin de communiquer avec le smartphone. Peut-être pas, peut-être pas souvent, mais de temps en temps, si vous me passez la formule. Ce qui veut dire que pendant que vous roulez, non seulement votre téléphone doit être allumé, mais la 4G (ou 3G) doit être activée, ainsi que le Bluetooth, et l’application Ally ouverte évidemment. Dans le cas contraire, votre GPS vous en fera la demande expresse.
Ally App relaiera aussi les notifications que vous recevez habituellement sur votre smartphone : SMS, notifications d’activité sur les réseaux sociaux… Je suis très partagé vis-à-vis de cette fonctionnalité. D’un côté cela peut-être très pratique, si vous attendez un message important, que vous êtes ultra connecté par goût ou pour raisons professionnelles ; d’un autre côté, dans le cas des SMS, c’est un peu une solution mi figue-mi raisin puisque les messages longs n’apparaissent pas en entier et il faudra de toute façon sortir son smartphone pour les lire intégralement. Et puis le vélo n’est-il pas un moment de lâcher-prise et de coupure avec la vie quotidienne ? Les notifications peuvent être un facteur qui perturbe ce moment privilégié… Dans tous les cas, vous pouvez tout à fait désactiver cette fonctionnalité.
4) D’enregistrer les données de la sortie après le ride, et de consulter les différentes informations et données inhérentes, même si ceci peut être fait à la maison sur l’écran plus confortable de votre ordinateur.
5) De consulter une aide en ligne, de gérer le live tracking, connaître en temps réel ses résultats sur les segments Strava, et beaucoup d’autres fonctionnalités que nous ne détaillerons pas ici.
Le site web Lezyne GPS Root
C’est sur ce site, véritable “portail” pour l’accès à toutes vos données, que vous allez créer des cartes “offline”. Ces cartes sont très utiles si vous avez sur votre smartphone une connexion au web limitée et/ou peu efficace ; ou si vous roulez dans des zones où la couverture web est mauvaise, le guidage ne fera pas appel à des données en ligne en temps réel via le smartphone, mais viendra les piocher dans une ou plusieurs de ces cartes que vous aurez préalablement stockées dans le GPS. C’est aussi sur le site GPS Root que vont se stocker toutes vos données d’activité, si vous décidez de confier à Lezyne votre contribution au “Big Data”. Mais vous n’êtes pas obligé ; certains choisirons peut-être de continuer à alimenter le Big Data de Strava, l’ogre omnipotent en la matière.
Création des cartes “offline”
Lezyne s’appuie sur Leaflet, une bibliothèque de cartes adaptatives Open Street MAP. C’est sur ces fonds de cartes, que l’on sélectionne la zone où l’on souhaite aller rouler. La taille maximum de la zone sélectionnable est relativement limitée, mais en cas de ride longue distance, on peut préparer à l’avance plusieurs cartes. Ces cartes “offline” seront stockées dans la mémoire flash du GPS (et on peut en stocker beaucoup, la mémoire du GPS et grande et les cartes sont légères). Lorsqu’on sort des limites de la carte, le GPS charge la carte suivante immédiatement et en toute fluidité, sans qu’on s’en rende compte à l’écran. Si vous n’avez pas prévu de carte offline pour la zone où vous roulez, il faudra alors faire appel aux capacités de connexion web en temps réel de votre smartphone pour que votre tracé apparaisse sur un fond de carte.
Sur l’écran du GPS, les cartes sont parfaites et très lisibles car très simples, mieux adaptées à mon avis à des sorties sportives que des fonds trop détaillés, ou le regard furtif du pilote peut se perdre si les informations sont trop fournies. À l’inverse, hors routes pour une pratique gravel, certains regretteront l’absence d’informations topographiques : types de pistes, repères ponctuels, végétation, courbes de niveaux… ici, un simple trait indique le chemin à suivre.
Les itinéraires
Il existe bon nombre de solutions en ligne ou hors ligne pour préparer les itinéraires qui vont nous guider pendant la sortie. Solutions gratuites, payantes, plus ou moins élaborées, spécifiques au vélo de route, au VTT… Le site GPS Root permet bien sûr d’importer des fichiers GPX ou TCX venus d’ailleurs, mais il propose son propre outil de tracé. C’est un outil basique mais efficace, simple d’utilisation, qui pourra convenir à ceux qui n’ont pas déjà leurs habitudes ailleurs.
L’appareil
Léger, compact, de bonne facture, le Mega C semble tout à fait solide et inspire confiance. Un bouchon en caoutchouc protège la prise USB et se dégage vers le bas, ce qui ne gêne pas la connexion en USB même lorsque le GPS est monté sur son support. Cette protection de la prise USB s’est révélée efficace même sous une pluie battante. Sur les côté, les 4 boutons permettent de naviguer dans l’interface du GPS, ce qui n’est pas sans rappeler les bonnes vieilles montres à quartz du siècle dernier… J’aime assez, on peut difficilement se tromper car en façade des logos simples et clairs indiquent les fonctions de chaque touche. Reste la question de la manipulation en roulant… Un écran tactile est bien plus pratique, mais cela impacte fortement le prix du GPS, et en hiver avec des gants les boutons sont parfois plus pratiques. Chacun jugera ; pour ma part, cela m’a dérangé uniquement de nuit sur des routes inconnues, quand il m’a fallu à maintes reprises réactiver le rétroéclairage. mais un simple réglage de configuration permet de maintenir le rétroéclairage permanent… Tout est question d’usage, de réglages et d’habitude.
L’écran
L’écran est très lisible, de jour comme de nuit. C’est un écran minimaliste, très économe en énergie, qui fait la part belle au noir et au blanc, les couleurs (bleu et rouge) servant simplement à “surligner” les données essentielles : tracé, sens de navigation, P.O.I… Il s’agit ici de donner la priorité au guidage, à l’info essentielle, c’est à dire la route à suivre. D’un simple regard furtif on sait si on est sur le bon chemin, sans être troublé ou distrait par des informations topographiques anecdotiques. Sur la route, c’est parfait ; mais pour un usage offroad c’est discutable…
Personnellement, j’ai opté pour une configuration d’écran noir avec le plan des routes en blanc, configuration que je trouve très lisible de jour, même en plein soleil, sans activer le mode rétro-éclairage. cela évite, la plupart du temps, d’aller “à la recherche” de celui des quatre boutons qui, sur les côtés de l’appareil, permet de l’activer. La nuit par contre, j’ai préféré le fond d’écran blanc et le tracé en noir, avec un réglage d’intensité du rétro-éclairage à 20% pour ne pas être ébloui pendant la sortie.
L’autonomie
Le Mega C est ̶d̶o̶n̶n̶é̶ vendu pour une autonomie de 32 heures ; personnellement, je l’ai laissé fonctionner pendant 25 heures sans qu’il ne s’éteigne… cette autonomie est bien sûr tributaire de la fréquence et la puissance du rétro-éclairage de l’écran, la température extérieure et sans doute plusieurs autres paramètres. Mais si vous utilisez ce GPS pour des sorties quotidiennes courtes, vous pourrez sans problème rouler tous les jours de la semaine sans le recharger ; n’oubliez cependant pas de le faire de temps en temps ! Pour des sorties plus longues, même si vous faites 400 km d’une seule traite, c’est plutôt pour votre smartphone que vous aurez besoin d’un système de rechargement… Dans tous les cas, le Mega C fonctionne pendant qu’il est sous tension, ce qui n’est pas le cas de tous les GPS.
Accessoires : les systèmes de fixation
Le support de cintre livré avec le GPS est simplissime, un support pivotant à fixer avec deux élastiques. Ça fait le job, mais il est plutôt protubérant, ce qui est assez moche sur le cintre, et cela ne le rend guère “aero” sur la barre transversale de mon prolongateur.
Le support déporté est vendu séparément. Il est étonnamment solide et bien conçu pour un prix aussi réduit : Une charnière articulée permet de le monter et le démonter en un tour de main, même si des gaînes de câbles cherchent à perturber l’opération ; la vis de serrage est sur le dessus, ce qui permet de ne pas s’escrimer sur sa clé Allen avec la tête en bas. Un décrochage du bras permet d’aligner le GPS dans le prolongement du cintre pour un effet plus aérodynamique. Un seul regret, cet accessoire conçu pour de cintres de diamètre 31.8mm est vendu sans adaptateurs lorsqu’on a des cintres de 25.4 ou 26mm… C’est bien dommage, ainsi l’offre aurait été absolument parfaite.
Conclusion
Même si j’ai mis un peu de temps à m’adapter à ce système très “High Tech”, où le smartphone a autant d’importance que le GPS lui-même, j’ai apprécié cet appareil léger, fiable, solide et élégant. Une fois les routines de connexions acquises, l’usage et le fonctionnement sont fluides. Ceci dit, en ce qui concerne mes pratiques cyclistes favorites, à savoir la longue distance sur route et le gravel, je ne pense pas que ce système soit le plus adapté. Pour la longue distance, il faudra gérer l’autonomie et la fiabilité de connexion du smartphone, dans des moments et des endroits où l’on a besoin de toute son énergie et son attention pour d’autres priorités. Pour le gravel, l’absence d’informations topographiques ne facilitera pas la navigation, surtout dans le cas de repérages ou de balade en territoire inconnu.
Par contre, pour des sorties sur route courtes et fréquentes, pour des cyclistes connectés qui ont besoin de rester en lien avec leur environnement social ou professionnel pendant leur activité de cyclisme, pour des sorties sur route le week-end que l’on souhaite enregistrer et partager rapidement, pour permettre à ses proches de suivre son activité vélo grâce au “live tracking”, cet appareil au prix modeste sera un précieux allié. À vous de déterminer où sont vos besoins principaux lorsque vous utilisez un GPS.
Durée du test : 2 mois, 2000 km
Pour : Le prix – le poids et la compacité – sobriété et élégance – la construction robuste – l’autonomie énergétique – la lisibilité de l’écran – L’efficacité des cartes routières – le support déporté (vendu séparément)
Contre : La dépendance vis-à-vis du smartphone – la forte orientation usage route – support de cintre protubérant
Pour et contre à la fois : Les fonctions par touches – l’appairage avec le smartphone – l’envoi de notifications
Prix : 199 €
Merci pour ce test hyper complet.
Merci Roch de nous lire !