Sur la piste du col du Comte au Ventoux – Photo Dan de Rosilles
Entrer dans un paysage sans en subir le cadre strict de ses grands axes routiers est un luxe de liberté que j’apprécie énormément. Les surprises sont autant de pépites de bonheur. Avec un vélo, de gravel, tel le chercheur d’or, je les découvre en tamisant ces nouveaux territoires à l’aide de la top25.
C’est ainsi que les pistes forestières de la Sainte-Victoire m’ont raconté l’histoire du massif et de ses barrages. J’ai compris l’obsession de Cézanne pour cette montagne. Sautant de pistes en chemins et sur les petites routes des plaines où courent les canaux d’irrigation, je n’ai pas trouvé de meilleur compagnon que ce vélo. Je ne suis pas un aventurier de nature, mais lorsque je suis sur mon gravel j’ai l’impression de le devenir, porté par la beauté des paysages que je traverse.
On devine pourquoi la pratique du gravel a eu tant de succès aux USA car elle appelle l’aventure et les grands espaces. Avec les sacoches de bikepacking accrochées sur le cadre, on retrouve l’image du pionnier découvrant les routes de l’ouest, ses deux sacoches en cuir jetées à l’arrière de sa selle avec sa couverture roulée. Il n’existe plus de tribus indiennes hostiles et nous avons tous des smartphones, mais l’aventure reste authentique. Cette nouvelle bagagerie, qui se scratche sans les porte-bagages qui défigurent le vélo, rend l’idée de voyage séduisante et légère.
Avec ce vélo, on peut se lancer en autosuffisance sur les routes et les chemins guidé par son GPS sur un parcours dont on aura savouré à l’avance la préparation sur un logiciel de tracé.
Il n’aimait pas les routes départementales …
Vous êtes peut-être trop jeunes pour vous souvenir de cet excellent sketch de Jean Yanne candidat au permis de conduire et de son dialogue avec son examinateur impressionné par la brute qu’il avait a évaluer. Il m’est revenu à l’esprit alors que je roulais sur une petite route poétique où l’herbe poussait par touffes en son milieu.
https://youtu.be/2n_Y59jlWao
L’examinateur : Bon, maintenant, vous êtes sur une route départementale…
Le candidat : J’y vais jamais sur les routes départementales, c’est plein de boue, et ça sent mauvais.
L’examinateur : Oui, j’entends bien, monsieur, mais c’est une supposition, vous êtes sur une route départementale…
Le candidat : Non, je suis pas sur une route départementale, je viens de vous dire que j’y mettais jamais les pieds sur les routes départementales ? J’aime pas ça, les routes départementales. Je hais les routes départementales. Les routes départementales, rien que de m’en causer, ça me donne envie d’envoyer des mandales dans la tronche à tout ce qui remue.
Et bien en gravel on aime les routes départementales et encore plus les pistes et les chemins larges qui nous éloignent des axes traditionnels maintes fois empruntés par les véhicules.
Redécouvrir l’histoire de notre pays
Sur un vélo de gravel, on sait que l’on peut passer à peu près partout. Les massifs et les plaines, sillonnés de pistes et de sentiers, deviennent d’immenses terrains de jeux sur lesquels nos gros pneus rebondissent de plaisir, sautant de pierre en pierre et se jouant des racines sortant de terre. En gravel, les zones péri-urbaines et autres no man’s land deviennent intéressants. On y pénètre discrètement, un peu en mode « urbex », pour découvrir les mutations de notre monde.
Le fond d’un lac vidé devient une opportunité de découvrir ce qui y était immergé. Ce sentiment d’être à l’aise partout stimule notre curiosité. Rien ne nous empêche de tenter ce petit passage qui semble mener nulle-part et qui, si on pousse plus loin, nous amène vers un lieu des plus surprenant. Ce vélo décloisonne le monde actuel, qui a tendance à créer de l’isolement. Il met des cyclistes éloignés en connexion. Chaque sortie gravel devient une nouvelle histoire à raconter ou à partager sur les réseaux sociaux.
Extrait de mon texte d’un article co-signé avec Dan de Rosilles et publié dans le dernier Cycle ! magazine que le vous invite à lire en intégralité en vous procurant ce numéro 12.
Merveilleux le pont Coquille !
Oui un super endroit … Il y en a un autre à Lourmarin. On y est passé en venant par le GR qui suit l’Aigue Brun … beaucoup de portage. C’est plus facile à atteindre par la combe de Lourmarin.
Le graveleux decouvre enfin la joie qu’a connu un vététiste
Il n’est jamais trop tard 😉
😉
Je partage avec vous ce que vous écrivez sur le bonheur de découvrir des endroits éloignés des grandes routes.
Je ne partage pas votre manière de corréler ce plaisir avec l’arrivée du gravier.
Comme Freddy l’indique, le VTT le permet depuis longtemps. Comme vous le savez, les randonneuses – si on veut faire plus de route – existaient encore avant et le permettaient aussi.
Tant mieux pour vous si découvrez cela maintenant, grâce à l’apparition de vélos graviers. Mais arrêtons les discours qui présentent cela comme une nouveauté et un plaisir accessible à celui qui passe à un nouveau vélo. Ressortez vos VTT rigides et chaussez-les de bons pneus souples modernes ! Le plaisir sur le vélo ne sera pas le même sur la route, mais celui de découvrir des coins reculés loin des routes encombrées par contre sera là et c’est le principal. “Peu importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse!”
Moi qui pratique le vélo non en tant que sport mais comme “activité de plein air”, ayant commencé par le VTT, puis le vélotaf, pour ensuite passer par la “moyenne/longue distance” en vélo couché, j’ai depuis le début (2005) trouvé très pertinent de faire des parcours mixtes. En 2013 j’ai “actualisé mon VTT en choisissant un modèle semi rigide, donc relativement léger (11kgs) dans cet esprit, mais je ne l’ai que rarement emmené sur des parcours à dominante “route” depuis la maison, car je pouvais sentir le piètre rendement et l’aérodynamisme discutable. Récemment (2017) je n’ai pas acheté un modèle officiellement labellisé “gravel”, par effet de mode tous sont soit trop lourds, et s’ils sont légers, trop chers. J’ai donc choisi un modèle “fitness”, à disques, adapté aux gros pneus avec des oeillets pour les garde-boue en hiver, et j’ai pu ainsi réaliser des parcours a dominante route, avec des sections de chemins, voire sentiers, et même dans des champs ou des sections avec portage !
Pour en venir aujourd’hui à de l’archéologie “moderne”; la découverte de lieux, ou de tracés datant du siècle dernier comme les anciennes voies de chemin de fer, qui sont présentes à peu près partout en France, héritage d’un mode de déplacement majoritaire jusqu’en 1950 supplanté par les “bagnoles” depuis.
1 exemple parmi d’autres vers chez moi ; l’ancienne ligne métrique Grenoble-La Mure-Gap, dont la première partie, à couper le souffle est encore existante depuis 1888, dont une seconde à été déferrée en 1952, et dont la dernière portion n’a jamais été terminée, abandonnée en 1942, plein de sections reprises par la nature, d’autres par les routes et des ouvrages d’art magnifiques à contempler…
https://fr.wikipedia.org/wiki/Chemin_de_fer_de_la_Mure
http://www.inventaires-ferroviaires.fr/hd05/05072.a.pdf
Alors je suis d’accord à la fois avec Patrick et Angstrom ; le VTT et la randonneuse le permettait déjà, mais le gravel rajoute la possibilité de faire des parcours de ~100kms avec 20-30% d’exploration de chemins, sans revenir complètement lessivé 😉
J’adhère complètement à cette idée d’archéologie « moderne » … J’ai tracé Nice – Meyrargues “Le train des pignes” (un parmi d’autres) deux ouvrages qui avaient été bombardés lors de la dernière guerre ont mis fin au fonctionnement de la ligne. Ce chemin de fer abandonné fait partie de la liste des lignes sacrifiées au profit du lobby de la route qui, déjà à l’époque, manipulait nos députés. Les suisses ont gardé leurs voies ferrées et ils les exploitent avec bonheur… Je n’ose même pas parler de la ligne de la petite ceinture à Paris : des dizaines d’années de débats stériles et couteux pour aboutir à rien du tout. Cette archéologie en vélo nous amène à refaire l’histoire de notre pays. Aujourd’hui routes saturées et polluantes et énorme paradoxe nous qui roulons en gravel on fuit ces axes pour retrouver ces fabuleux paysages que les trains traversaient autrefois.
Disons que c’est un peu l’école des fans et tout le monde a raison, tout le monde a gagné !
Bien sûr que ces chemins sont accessibles aussi en vtt, tout rigide ou tout suspendu. Millésimés 2019 ou 1975. La racine évoquée par Patrick sera franchie encore plus facilement sur un vtt que sur un gravier/gravel.
Peut-être que ce type de vélos (gravel/gravier) invite à un peu plus d’exploration (pour ma part en tout cas). Quand je tournais toujours dans les mêmes coins en vtt (il y a 20 ans), le fait d’avoir un vélo plus roulant sous les fesses (aujourd’hui) me pousse à explorer d’autres massifs, plus loin, quitte à faire de la route pour y aller. A moins que. A moins que, ayant découvert le vélo de route il n’y a que quelques années, 3 ans pour être précis, à moins donc, que je me sois rendu compte que 10/20/30km en vélo, sur la route, est finalement une distance aisée à parcourir.
pour faire des sorties mixtes (certains sont en gravel, d’autres en cyclocross, d’autres en vtt), on voit bien que chaque vélo a son terrain de prédilection. Aucun vélo n’est parfait partout.
Ce qui me semble indéniable, l’arrivée du gravel/gravier est accompagnée par tout un écosystème qui invite à prendre la poudre d’escampette et sortir de ses propres sentiers battus. Cet écosystème comprend entre autres les systèmes de portage de bike-packing, qui n’existaient pas il y a peu. Cet écosystème comprend également l’arrivée des GPS et autres solutions de guidages, sans parler du tubeless. Tout ceci facilite l’aventure, la rend aussi, paradoxalement moins aventureuse ! Peu importe si cette aventure se décline avec un “A” majuscule ou un tout petit “a” tout timide. Comme tu le dis Angstrom, “peu importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse” et je serais tenté d’ajouter, “t’occupes pas de la tête du vélo et pédale”.
Merci Jérôme pour ta lecture du message que je souhaitais faire transmettre. Je ne suis pas passé par la case VTT, mais je pense que nous vivons les mêmes frissons de découvertes que nos amis VTistes, surtout ceux de la première heure qui roulaient sur des cadres rigides …
Depuis plus de 45 ans, je pratique assidûment le vélo de route et également le VTT depuis son apparition en France. Je rejoint totalement les propos de Patrick, le Gravel ma fait découvrir une nouvelle façon de pratiquer mon sport favori. Je vais beaucoup plus loin et je suis plus dans l’exploration.
bonjour,
je rejoint Amstrong et comme dit, le VTT à toujours permit d’aller faire des parcours sur des chemins…la mode qui est dite “Gravel” c’est bien pour ce qui découvre autre chose que la route…
pour ma part depuis 40ans je fait du VTT et de la route ; donc pas besoin de vélo spécial..également du cyclo camping avec mon vtt aménagé…son poids ne m’empêche pas de faire de grandes distances…
merci tous de même à ce site qui me fait passer des bons moments de lecture ; et suivre un peu les nouveautés..Cdllt.Rv
Le gravel (j’aime beaucoup la dénomination « vélo de garnotte » de nos cousins d’outre-atlantique) est bien plus ou autre chose qu’un phénomène marketing, ce n’est pas non plus une révolution, c’est un retour aux sources du vélo, une évolution de choses existantes avec la technologie d’aujourd’hui. Je roule en pur VTT et depuis plusieurs mois je roule aussi avec un STIFF gravel, j’ai vendu mon « vieux » Look KG381 que j’utilisais sur route. Oui, un VTT rigide équipé de pneus slicks peut aussi remplir ce rôle. Le gravel est le descendant des premiers vélos, des randonneuses à gros boudins, des cyclomuletiers.
Pour ma part, le vélo de garnotte me permet de redécouvrir des coins que je fréquentais en vélo de route ou en VTT, de rouler sur des chemins que je n’aurais pas abordés en VTT (« trop » de goudron pour y accéder par exemple), de mixer les deux pratiques. Je fais des circuits avec ce vélo que je ne ferai pas avec mon VTT (et j’ai aussi une pratique pure tout-terrain où mon tout-suspendu titane a quand même l’avantage, ça tabasse dur, il y a de la grosse caillasse, ou alors c’est moi qui n’ai pas le niveau pour y passer en gravel), il est des circuits que je faisais en VTT que je ne fais maintenant qu’en gravel. Il peut donc être le vélo unique d’un pratiquant qui souhaite se mettre au vélo et profiter de tous les terrains. Il a eu toute sa place aux États-Unis où les espaces sont plus grands et présentent de longues pistes. Chez nous aussi, il a sa place et effectivement permet de découvrir des sentiers « oubliés » dans nos campagnes ou dans certains sites naturels, notamment en Provence où les terrains sont particulièrement favorables à sa pratique. Je viens par exemple de faire récemment le tour du bassin d’Arcachon, je n’aurais pas fait ce circuit avec mon VTT (portions « trop » roulantes, je me serais ennuyé avec le VTT) et je n’aurais pas pu le faire avec un vélo pur route, une centaine de bornes au plus près de l’eau, par des pistes, des sentiers, des cyclables, un peu de goudron. Je me suis régalé, j’en ai pris plein les yeux. Le rythme est différent du VTT ou de la pratique sur route ou est un mélange des deux : le vélo peut être très réactif et le confort est là, notamment grâce aux roues, quand ça secoue.
Et si le gravel, on l’appelle comme on veut, permet de développer la pratique cycliste, tant mieux !