Shimano vient de lancer son nouveau groupe Di2 spécialisé gravel, le GRX 825, qui rejoint la prestigieuse famille des groupes Di2 à 12 vitesses : le Dura-Ace R9270, l’Ultegra R8100 et le 105 Di2. Fervent utilisateur du GRX 11 vitesses sur mon vélo de route endurance Chiru Kunlun, je n’ai pu résister à la tentation de tester cette nouvelle version du GRX Di2. Mais ce GRX 825 est-il vraiment différent du 11 vitesses ? Qu’est-ce qui le caractérise, qu’est-ce qui le différencie de son prédécesseur ? Le passage du 11 au 12 vaut-il le coup ?
Pour tenter de répondre à ces questions, je me suis, dans cet article, penché plus précisément sur le montage du groupe et le détail des différents composants. Un second article sera consacré, dans les semaines à venir, au test de terrain de ce groupe GRX 825.
Rêve de Vélo
C’est Rêve de Vélo, Shimano Service Center à Montpellier, qui a été choisi par Shimano France pour le montage du groupe.
Dans un “Shimano Service Center“, tous les techniciens sont formés aux spécificités du matériel Shimano. Un Shimano Service Center est l’endroit où vous aurez l’assurance d’être conseillé et pris en charge par des techniciens qui connaissent les équipements Shimano, qui sont formés aux dernières nouveautés et peuvent accéder à tous les documents techniques de la marque.
En plus qu’être un Shimano Center, Rêve de Vélo Montpellier Sud offre une large palette de services. Comme dans ses trois autres magasins de la région (Nîmes Vaunage, Lunel et Ventoux), Rêve de Vélo propose aux cyclistes une agence de location de vélos, Academy, un service de formation à la pratique du vélo et Travel, une agence de voyage à vélo.
Plus anecdotique mais pas sans importance, il y a même, dans le magasin de Montpellier, deux douches à disposition pour les clients qui arrivent à vélo et qui voudraient se rafraîchir après une séance à haute intensité. Tout, ici, est fait et pensé pour les cyclistes.
Connectons-nous
Je rejoins l’atelier, où 6 mécanos se partagent l’espace. C’est Valentin qui se charge de mon vélo. Il va remplacer l’ancien groupe GRX 815 à 11 vitesses par le nouveau groupe RX 825 à 12 vitesses. Le groupe est tout nouveau, ce n’est que la deuxième fois qu’il le monte ; mais le jeune technicien n’a pas l’air de craindre le challenge.
Il commence par me présenter les nouveaux câbles de connection, plus fins que ceux du 11 vitesses, avec des connecteurs plus frêles (et plus fragiles aussi). Il est donc fortement conseillé d’utilisé le petit outil livré avec le groupe pour connecter (ou déconnecter) ces câbles.
Mais ce qui change fondamentalement pour ce montage par rapport à celui du groupe précédent, c’est que le nouveau GRX Di2 n’est plus physiquement relié aux manettes. Comme pour les groupes route Ultegra et Dura-Ace Di2, on ne câble que l’arrière du vélo, ce qui représente un gain de temps notable pour les mécaniciens. Lorsqu’ils ont affaire à des cintres carbone et des vélos haut de gamme dont la câblerie est entièrement intégrée, le temps de montage est divisé par deux avec le GRX 825 et ses manettes à transmission par ondes.
à la charge
Valentin en profite pour me parler du nouveau système de charge de la batterie, un connecteur magnétique situé sur la partie basse du dérailleur arrière et non plus au bout du cintre ou sous la potence. Encore du travail en moins pour le monteur du vélo, qui en est ravi. Quant à moi, je trouve que ce nouveau branchement est nettement mois pratique et accessible que les connecteurs du 11 vitesses, proches du poste de pilotage. On verra à l’usage si ce nouvel emplacement arrive à me séduire ; j’imagine qu’il faudra s’agenouiller pour repérer l’emplacement de charge et trouver comment soulever le petit capot en plastique qui protège le connecteur magnétique.
Précisons que le nouveau chargeur se résume à un simple câble (le précédent intégrait un boîtier relativement volumineux) et que Shimano préconise de le brancher sur un chargeur USB “normal”, c’est à dire 5W maximum, pas sur un chargeur rapide qui risquerait d’abîmer la batterie prématurément. Plus la recharge est lente, plus on préserve la batterie. Shimano va même jusqu’à préconiser le chargement via un port USB d’ordinateur !
La nouvelle batterie
On sait que dans l’archipel Di2, la batterie a un rôle central, et ce à plus d’un titre. Non seulement elle alimente en électricité les composants câblés, mais elle est aussi le cerveau du système et intègre le logiciel qui gère les mises à jour et communique avec les composants.
La batterie garde aussi en mémoire l’historique de l’utilisation du groupe. On pourra par exemple savoir quelles ont été les vitesses les plus utilisées par le cycliste. Plus généralement, les rapports de service sont visibles et exportables par les mécaniciens via la version pro de l’application E-Tube Cyclist.
La nouvelle batterie du 12 vitesses se distingue de la précédente par la présence de trois ports, au lieu de deux. Celui du haut est le port principal, les deux du dessous sont des ports secondaires. C’est donc le port supérieur qu’il faut absolument câbler avec l’un des deux dérailleurs (Shimano préconise le dérailleur arrière). Le branchement des dérailleurs sur les deux ports secondaires rendrait le groupe inopérant.
On pourrait alors se demander pourquoi il y a trois ports sur la nouvelle batterie, lorsque deux suffiraient. La réponse est simple : avec l’émergence sur le marché de produits compatibles Di2, comme les lumières ou radars Garmin, la possibilité de les alimenter et les interconnecter avec le Di2 s’impose. Je récapitule le branchement idéal : le dérailleur arrière sur le port principal, le dérailleur avant sur un port secondaire, les périphériques compatibles sur l’autre port secondaire.
Une cassette finement étagée
La cassette 12 vitesses est mieux étagée que la 11 vitesses. C’est sur les petites couronnes de 11 à 15 dents que la finesse vient se loger, avec une progression d’une seule dent au lieu de deux. Alors que la cassette 11 vitesses était étagée de la manière suivante : 11-13-15-17-19-21-23-25-27-30-34, la 12 vitesses suit la progression que voici : 11-12-13-14-15-17-19-21-24-27-30-34.
Les cyclistes puissants qui aiment envoyer “tout à droite” apprécieront, mais aussi ceux qui exploitent souvent le petit plateau sur les chemins de gravel ou qui aiment, en zone vallonnée, basculer du grand au petit plateau sans toucher à la cassette. Dans tous les cas, la subtilité d’un étagement serré comme variable d’ajustement devrait satisfaire l’ensemble des utilisateurs.
Ma stratégie transmission
J’ai fait le choix de monter une cassette haut-de-gamme, la Dura-Ace 12v 11-34. Pourquoi 34 et pas 36 ? Parce que mon vélo est un allroad et pas un gravel, même si je fais du bikepacking je n’aurais pas, a priori, à gravir des chemins très techniques, caillouteux et escarpés.
Pourquoi une cassette haut-de-gamme ? Pour gagner du poids et bénéficier d’une dentition plus durable. En changeant de chaîne régulièrement, tous les 2000 km environ, ma cassette durera très longtemps et l’investissement sera rentable à long terme.
La chaîne 12 vitesses, comme la 11, a un sens de montage : on doit pouvoir lire l’inscription “Shimano” lorsqu’on est face à la transmission. Valentin attire mon attention sur le tendeur de chaîne situé sur le dérailleur arrière. Il n’a pas vocation à être enclenché en permanence, et doit être utilisé ponctuellement (sur des descentes caillouteuses qui secouent par exemple), et uniquement sur un ou deux pignons. L’activer en permanence et/ou balayer la cassette “sous tendeur” va user prématurément la transmission et pourrait, à terme, endommager gravement le dérailleur.
Penchons-nous sur le dérailleur arrière
De visu, ce nouveau dérailleur est plus massif que l’ancien. C’est normal, il contient plus de hardware, comme bien sûr la partie consacrée à la recharge. Il est très légèrement plus lourd (sans jeu de mot) que le dérailleur 11 vitesses : 310 contre 287 g.
Comme je l’ai déjà évoqué, le dérailleur arrière accueille le port de charge, un connecteur magnétique que je trouve de prime abord peu pratique, avec un magnétisme un peu faiblard et un capot de protection difficile à ouvrir. On verra si, avec l’habitude, j’apprendrai à apprécier ce port de charge. Pour l’instant, il ne me plaît guère.
Same same but different
Le dérailleur avant ne se distingue pas de son prédécesseur, si ce n’est par le prix : comptez une trentaine d’euros supplémentaires en moyenne. Même taille, même forme, même emplacement des vis de pointeau et de butée ; seul le connecteur de câblage est différent, puisque les câbles du 12 vitesse sont plus fins.
Comme pour le 11 vitesses, le réglage fin de fourchette se fait sur l’écran du smartphone, via l’application E-tube Cyclist.
Aux manettes
Nous déballons les nouvelles manettes. Immédiatement, un détail saute aux yeux : la partie supérieure est nettement plus saillante que les anciennes. C’est parce qu’elles abritent chacune deux piles boutons, puisqu’elles ne sont plus alimentées par la batterie centrale. Sur le devant de la partie supérieure, on note la présence d’une petite diode qui permet de vérifier l’état de charge des piles bouton. Un appui simultané sur les deux leviers de la manette éclairera cette diode en vert, orange ou rouge selon l’état de charge des piles. L’application E-Tube Cyclist permettra de vérifier (plus finement, en pourcentage) cet état de charge.
Une remarque cependant pour les plus conservateurs d’entre nous : il est toujours possible d’alimenter les manettes via la batterie centrale si on est rassuré par cette option.
L’autre caractéristique de ces manettes, c’est que leur ergonomie a été revue. Le revêtement en caoutchouc est différent, plus agrippant, a priori. Elles ont surtout été redessinées avec un légère torsion vers l’extérieur pour mieux s’adapter aux cintres qui ont beaucoup de flare (ouverture du bas du cintre sur l’extérieur pour favoriser le pilotage dans les parties techniques), relativement courants sur les gravel. Je m’inquiète de savoir si cette torsion sera problématique sur mon cintre route peu ouvert. Je me demande aussi si la partie supérieure, plus large et plus haute, conviendra à mes mains. Mais c’est seulement lors du test de terrain, à l’occasion de sorties longues, que je pourrai me faire un avis.
Sans attendre le test de terrain, je peux déjà annoncer une bonne nouvelle : les manettes du GRX 825 permettent l’ajustement de la garde du levier, pour mieux s’adapter à toutes les mains. Ce n’était pas le cas sur le 11 vitesses. Dans les questions concernant les ajustements du cockpit, on peut aussi noter que le reach des manettes (leur portée vers l’avant par rapport au cintre) est identique à celui des anciennes manettes. Concrètement, on n’aura pas besoin de changer de potence en passant du 11 au 12.
Le bouton de commande secondaire, situé à l’intérieur de la cocotte, est au même emplacement que sur l’ancienne manette. Il parait qu’il est plus saillant, donc plus facile à cliquer. A première vue, ce n’est pas flagrant, je n’avais déjà pas trouvé cet emplacement très ergonomique sur le 11 vitesses. Pourquoi ce bouton n’est-il pas situé sur le dessus de la cocotte, comme sur le Dura-Ace et l’Ultegra ? C’est pourtant bien mieux à mon avis. Mystère… nous verrons bien à l’usage.
Anecdote intéressante que me signale Valentin : comme les manettes communiquent désormais par bluetooth, chaque manette possède son numéro Bluetooth individuel (le même que son numéro de série). L’idée est bien sûr que votre manette ne communique pas avec le groupe du cycliste d’à côté !
Les freins
Comme d’habitude, le circuit hydraulique de freinage contient de l’huile minérale, estampillée Shimano. Pour des raisons de garantie, seule cette huile est autorisée pour le montage, même si lors de la grande carence du Covid, Shimano avait autorisé l’utilisation de la Royal Blue de Magura pour les montages dans les Shimano Centers.
Les disques sont au standard Centerlock, qui est celui retenu chez Shimano pour les groupes haut-de-gamme. C’est le standard préféré des mécanos en terme de montage/démontage. Les disques sont à plusieurs composants pour mieux dissiper la chaleur et éviter la déformation du disque. Valentin m’explique que le composant central en étoile est noir car cette couleur est celle qui diffuse le mieux la chaleur. On retrouve aussi des ailettes sur les plaquettes de frein pour le refroidissement.
Nous y sommes
Le montage est terminé. Valentin a bien repositionné les cocottes sur le cintre et installé une guidoline toute neuve. Avec l’application mobile E-Tube project Cyclist sur mon téléphone, je vérifie la bonne connexion avec le vélo et en profite pour réviser avec Valentin les réglages fins des dérailleurs avant et arrière.
Le vélo est prêt, je suis impatient d’aller rouler pour quelques aventures au long cours et vous raconter la suite : la fiabilité de ce groupe, ses aspects pratiques et concrets sur le terrain. Mais ceci fera l’objet d’un prochain article…