Chaque semaine, un billet d’humeur par un·e de nos rédacteur·ice. Aujourd’hui : Anne Fontanesi
Tu le savais ? Aujourd’hui lundi 25 novembre, c’est la journée mondiale de lutte contre les violences faites aux femmes.
Le vélo peut dégommer cette injustice monumentale ? Probablement pas.
Mais sous cette grosse affaire de violences qu’on médiatise une fois par an, histoire de calmer les consciences, il y a tout un bordel bien infusé dans nos sociétés. Des injustices qui se faufilent dans chaque interstice de nos vies, planquées dans les plis du quotidien. Elles sont là, partout. Au taf, dans les familles, entre potes, sur les réseaux. Racisme rampant, harcèlement moral ou sexuel, humiliations banales, violences routières, oppressions systémiques. Une longue liste qui pue le pouvoir mal digéré.
Alors, le vélo dans tout ça ? Et bien des fois, il fait péter quelques verrous, éclaire des zones sombres, et met en branle des résistances minuscules. Qui pourraient devenir grandes ? J’en sais rien. Parfois, c’est juste une manière de dire non.
Avec du concret, tu verrais mieux de quoi je parle ? Juste avant les élections aux States, Dan de Rosilles a balancé un édito qui parle de la Ovarian Psycos Bicycle Brigade. Une meute de féministes latinas qui dévalent les rues de l’Eastside à Los Angeles.
À vélo, elles se réapproprient l’espace. Elles affrontent le racisme, les violences dans leurs rues et se battent pour les communautés précaires. Les Ovas, comme elles se surnomment, transforment le vélo en arme, en étendard. Clairement, elles n’attendent pas qu’on leur tende la main. Elles prennent.
En France, dans le même état d’esprit, il y a Les Déchainé·e·s à Marseille. C’est un collectif cycloféministe, fondé en 2020, qui rassemble des personnes de pluralité de genres qui pédalent et qui ont souhaité se fédérer pour se réapproprier la pratique du vélo, de l’espace public face à une société bien trop patriarcale pour être honnête, soit dit en passant. Et elles ont rédigé un manifeste qui explique qui elles sont et qui elles défendent. C’est stylé.
Au rayon des rayons, il y a la London Bike Kitchen qui organise des ateliers de mécanique en non-mixité choisie. Des ateliers animés par des femmes, pour des femmes ou des personnes non genrées. Pourquoi ? Parce qu’un gars qui t’explique en te regardant de haut, on connaît.
Là, on déconstruit le schéma, on apprend sans le poids du jugement, on reprend du terrain sur les complexes d’infériorité. Bref, c’est punk, et ça marche.
Paillettes et Cambouis bricole le même genre de trucs à Paris. Vélo, fêtes et autogestion en sous-titre. En ouvrant un atelier vélo participatif et solidaire rue Blache dans le 10ème, iels militent pour une société inclusive, écologique, solidaire, participative, en utilisant le vélo, la mixité choisie et la fête comme armes politiques et travaillent à l’émancipation de chacun·e grâce au vélo et à l’apprentissage de la mécanique, l’usage du vélo comme moyen de mobilité, de créativité et de loisirs.
Là aussi, iels ont décidé de pratiquer la transmission horizontale des savoirs-faire, sans surplomb.
On retourne chez les Anglo-saxons ? The Adventure Syndicate, c’est des nanas qui déchirent à vélo pour pousser d’autres femmes à briser leurs propres chaînes. Ateliers d’écriture, podcasts, films, événements, camps d’entraînement. Tout pour dire : « T’as plus de force que tu crois. Bouge. » Elles ne se contentent pas d’inspirer. Elles donnent des outils pour que ça roule, au sens propre comme au figuré.
Et pour essayer, on peut s’inscrire à quoi ? En Espagne par exemple, Transiberica, un organisateur de courses d’ultra-distance, a capté que trop peu de femmes osaient se lancer. Du coup, en mai prochain, ils organisent leur Women Cycling Camp 2025. L’idée : réunir des femmes, encadrées par des championnes, pour qu’elles testent leurs limites, chopent la confiance, et se disent que l’ultra-distance, c’est aussi pour elles.
Moi ? J’y serai. Pas pour jouer les héroïnes, mais pour vivre ça, et raconter l’histoire sur Bike Café bien sûr !
Et toi, tu fais quoi ? On n’a pas toutes une brigade féministe ou un camp d’entraînement sous la main. Mais ce qu’on peut faire, c’est prendre conscience des petites violences qu’on perpétue sans y penser. Et puis, monter en selle, pédaler jusqu’à ce que le poids des conneries lâche prise. Franchement, y a pire comme thérapie.