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PFAS : la chasse aux polyfluoroalkylées est ouverte

Dans le monde du textile vélo, les fabricants n’ont eu de cesse de faire progresser techniquement nos équipements. Ils nous protègent des éléments : la pluie, la chaleur, le froid… Certains prétendent même nous apporter un gain de performance. Le maillot en laine de papa est passé dans les oubliettes de l’histoire, rongé par les mites. Ce changement s’est opéré dans les années 60, quand il a été remplacé par des maillots en Lycra“, issus de la pétrochimie. Alertée par de nombreuses études portant sur les conséquences environnementales et les impacts sur notre santé liés à ces nouvelles matières, la société opère une prise de conscience ces dernières années. Elle conduit les marques de textiles techniques sportifs à revoir leur copie et à chercher d’autres solutions. Ces matières sont dans le collimateur du législatif et la France vient de voter une interdiction des PFAS à partir du 1er janvier 2026 : la chasse aux polyfluoroalkylées est ouverte dans notre vestiaire cycliste.

Le 20 février, l’Assemblée nationale a approuvé une proposition de loi écologiste restreignant la fabrication et la vente de produits contenant ces « polluants éternels » appelés PFAS, qui sont massivement présents dans l’environnement et dont l’impact sur la santé nous inquiète. Avec des interdictions qui prennent effet en 2026 et 2030, la France devient “pionnière” dans cette lutte environnementale par rapport aux autres pays. Un article important de la loi qui prendra effet dès le 1er janvier 2026, interdira la fabrication, l’importation, et la vente de tout produit contenant des PFAS notamment des produits textiles. Il en est de même en Californie et dans l’État de New York comme le souligne l’excellent média US Bikepacking.com dans un très bon article sur le sujet.

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C’est quoi les PFAS ?

Je ne suis pas un expert et je préfère me référer à une définition qui émane de l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) : “Les substances per- et polyfluoroalkylées, ou PFAS, représentent une vaste famille de plusieurs milliers de composés chimiques. Antiadhésives, imperméabilisantes, résistantes aux fortes chaleurs, ces substances sont largement utilisées depuis les années 1950 dans diverses applications industrielles et produits de consommation courante : textiles, emballages alimentaires, mousses anti-incendie, gaz réfrigérants, revêtements antiadhésifs, cosmétiques, dispositifs médicaux, produits phytopharmaceutiques, etc.“, (source).

Une étude menée par Greenpeace en 2016 intitulée “Leaving Traces” montre que 90 % des produits outdoor testés pour cette étude contenaient des PFC (ou PFAS).

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Un contexte de sur-consommation

La production de fibres synthétiques pour l’industrie textile représente actuellement 1,35% de la consommation mondiale de pétrole. Cela dépasse la consommation annuelle de pétrole de l’Espagne.” nous indique une étude de la Changing Markets Foundation. Dans cette forêt de matières aux noms étranges, inventées par le marketing, il faut plutôt se référer à l’étiquette de la composition pour essayer d’y voir plus clair. Chacun pourra porter un jugement sur l’intérêt de cette abondante production. Elle est largement augmentée par la “Fast fashion” qui a fait exploser la production de produits jetables, qui s’amoncellent ensuite en Afrique après une courte vie dans les pays riches. Je vous invite à écouter ce podcast édifiant réalisé par Giv Anquetil sur France Inter qui parle des 260 000 tonnes de vêtements de seconde main (de l’homme blanc mort) qui débarquent chaque année au port d’Accra au Ghana.

PFAS
Photo ©Radio France – Giv Anquetil

Autrefois, on se souvenait d’un vêtement que l’on avait porté, aujourd’hui le Nième tee-shirt fera oublier tous les autres. Avant, ils étaient en coton et pouvaient finir en chiffons, désormais je ne peux même plus faire mes vitres ni nettoyer mon vélo avec mon vieux tee-shirt usé. “On vit un moment unique dans l’histoire de l’humanité en voyant le nombre de vêtements que l’on achète et que l’on ne porte pas“.”, me dit Eric Yung, Président Directeur Général de Polartec. C’est un phénomène bien réel comme le souligne une autre étude en 2017 de la fondation Ellen MacArthur.

Textile
Source Technon OrbiChem … publié sur unemodemeilleure.substack.com

Nous sommes de plus en plus sensibilisés à l’impact sur notre santé. Nos fonctions de base : respirer, manger, travailler, nous exposent à des risques. Dans nos activités sportives, c’est encore plus sensible : la qualité de l’air que nous respirons, les aliments que nous consommons et les équipements que nous utilisons doivent être qualitatifs. La nature dans laquelle nous évoluons mérite le plus grand respect.

S’agissant de notre vestiaire cycliste, la raison devrait l’emporter sur la quantité nécessaire à nos tenues afin d’éviter cette sur-consommation. Dans nos achats de produits techniques, il semblerait que les cyclistes soient moins regardant dans la lecture de l’étiquette que d’autres pratiquants de sports outdoor (montagne, trail running…). Les marques de produits de montagne ont été sensibilisées un peu plus tôt à ce sujet.

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Dans le vélo

Aujourd’hui, nous aurions du mal à nous passer des équipement textiles techniques qui nous permettent de résister aux aléas météorologiques auxquels nous sommes exposés. Nous voulons être protégés de la pluie, du vent, de la chaleur… Ces arguments reviennent en boucle pour vanter de nouvelles matières encore plus formidables que les précédentes. Les mises en garde des agences de santé et les dispositions législatives vont agir pour encadrer cette production.

PFAS
Test de la veste Magic de Polartec – photo Patrick VDB

Je suis, comme vous, un peu perdu dans le verbiage marketing qui accompagne la promesse de ces produits. Pour mieux comprendre, j’ai cherché à savoir quelles étaient les positions des principales marques fournissant ou utilisant des membranes techniques vis-à-vis des mises en garde et interdictions concernant les PFAS.

Chez les fournisseurs de membranes

Les principaux fournisseurs de membranes ont pris des mesures PFAS Free en proposant de nouvelles technologies excluant ces substances per- et polyfluoroalkylées.

Polartec

La solution proposée est la membrane Polartec® Power Shield™ Pro. Je cite : Elle est fabriquée à partir de nylon renouvelable à base de plantes sans OGM et d’une membrane innovante non-PFAS. En plus d’être doux, flexible et très polyvalent, elle offre une durabilité exceptionnelle tout en délivrant une empreinte carbone inférieure de 50 % à celle du Nylon 6,6 vierge, l’étalon-or par rapport auquel les autres nylons sont mesurés. La composition de Power Shield sans produits chimiques est créée dans une usine certifiée bluesign®, ce qui garantit une fabrication plus responsable et plus durable. Et en imitant la résistance et la souplesse du nylon traditionnel, Power Shield™ Pro assure une protection durable en plus d’établir une nouvelle référence pour les tissus performants respectueux de l’environnement.” Il existe également la membrane Power Shield™ RPM, faite de polyester recyclé que nous avons pu évaluer lors de notre test récent de la veste Magic de Santini. Alors que Power Shield™ Pro s’adresse aux équipements de montagne, la membrane Power Shield™ RPM couvre le besoin des cyclistes, comme nous l’explique Eric Yung, le Président Directeur Général de Polartec.

Podcast Bla Bla 146 avec Eric Yung

Gore-Tex

Gore déclare sur une page internet dédiée : “En tant que marque chez GORE‑TEX, nous attachons autant d’importance au respect de l’environnement qu’à la performance.” Les membranes Gore-Tex sont utilisées, comme celles de Polartec, par plusieurs marques dont la marque Gore Wear qui a fait son “coming out” de l’utilisation des PFAS. Le retrait spectaculaire de sa veste Shakedry qu’on adorait illustre ce revirement. Cette veste était formidable à bien des égards, mais voilà elle utilisait cette matière qui la rendait étanche. La naissance de la membrane ePE Gore-Tex va pemettre de combler le manque que sa disparition du catalogue a créé.

Pertex

PFAS

La société Pertex, qui fabrique depuis 1979 des tissus techniques de haute performance, prend également position sur le sujet : “La technologie Pertex Endurance est une application unique à base de silicone sans PFAS, qui enveloppe les fibres individuelles, formant une barrière extrêmement hydrofuge qui surpasse même les finitions conventionnelles à base de PFAS.” Ce fabricant est plutôt présent dans les marques de produits de montagne.

Chez les marques textiles du vélo

PFAS
Test d’une tenue 7Mesh Airmap par Laurent – photo Denis Cauvin

Les marques de textiles utilisent parfois pour leurs modèles des membranes fournies par des fabricants. Santini par exemple s’appuie sur la membrane Polartec® Power Shield pour fabriquer sa veste Magic. Depuis octobre 2024, Rapha propose sa veste de pluie GORE-TEX Rain Jacket utilisant une nouvelle matière 3 couches exempte de PFAS. La marque, partenaire de GORE-TEX depuis longtemps, déclare “Dans le cadre de nos engagements en matière d’impact environnemental, nous nous sommes engagés à ce que notre production soit totalement exempte de PFAS* d’ici fin 2025.” Elle utilise désormais la membrane ePE (en polyéthylène expansé) sans PFAS. Cette membrane est à la fois légère, résistante et approuvée par le label qualité bluesign. Pour la marque canadienne 7Mesh, il en est de même pour son tissu Airmap. Laurent qui a réalisé le test en 2023 nous le précise dans son article que vous pouvez relire ici.

Pour Decathlon, la position de la marque est la suivante : “Les PFC (ou PFAS) sont des traitements couramment utilisés sur les articles de sport outdoor qui nécessitent une déperlance forte vis-à-vis de la pluie. Ces substances persistantes et bioaccumulatives représentent un risque environnemental et sanitaire majeur. DECATHLON a commencé à travailler sur ce sujet dès 2014 en étudiant les différentes technologies et alternatives sur le marché. En 2022, nous avons interdit les PFC dans nos productions textiles. Actuellement, en 2024, la plupart de nos produits nécessitant une imperméabilité à l’eau utilisent des nouvelles technologies sans PFC lorsque cela est techniquement possible.” Notons que la marque parle de “la plupart” ; évolution à suivre, au regard de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi…

Devant le nombre de marques (UYN, Isadore, Pas Normal, Castelli/Sportful, Alé Cycling…), je vous renvoie à une recherche scrupuleuse à votre niveau : questionnement des vendeurs, lecture des étiquettes.

Pour conclure

PFAS

La législation s’est emparée du problème et les marques de textiles techniques sportifs proposent d’autres solutions. Le 1er janvier, en France ce sera fini pour les PFAS pour nos textiles vélo, même si on continuera à utiliser des ustensiles de cuisine qui en contiennent jusqu’en 2030 😉 Le consommateur est averti et il devra exercer sa vigilance sur les étiquettes des vêtements qui devront être désormais plus claires sur la nature des matériaux utilisés. Les enjeux écologiques nous amènent à réfléchir sur notre façon de vivre en harmonie dans cette nature dans laquelle nous pratiquons notre sport préféré, le vélo. Il est peut-être préférable d’être un peu mouillé, que d’utiliser des matières qui peuvent être mauvaises pour notre santé. Dans cette jungle de matière issues de la pétrochimie, il conviendra de faire un choix favorisant les produits éthiques et durables. Des organismes surveillant les dernières normes du secteur telles que la Global Recycled Standard, bluesign® ou la certification OEKO-TEX® Standard 100 peuvent nous aider à favoriser les marques qui respectent l’ensemble de la filière, partant de la matière brute jusqu’à sa mise en vente chez les détaillants.

Patrick
Patrick
Patrick Van Den Bossche a créé les blogs Running Café, Track & News, puis Bike Café. Curieux invétéré, dénicheur de tendances, il adore mettre en lumière les personnalités et les anonymes du petit monde du vélo. Il collabore régulièrement à la revue Cyclist France et affectionne les vieux vélos et la tendance "vintage". Depuis sa découverte du gravel bike en 2015, il s'adonne régulièrement à des sorties sur route et sur chemins autour de la Sainte-Victoire.

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