Photo à la une John Kovalski
Nous avons assisté cette année a un Concours de Machines particulièrement réussi. Le succès de cet événement vient de la qualité des réalisations présentées mais aussi pour beaucoup à l’ambiance et le contexte de ce départ du 19ème Paris – Brest – Paris qui a eut lieu lors de ce dernier week-end à la bergerie royale de Rambouillet. La pluie incessante de ces deux jours, n’a pas gâché notre plaisir d’être là pour assister à ce rendez-vous annuel des artisans de la « haute couture du cycle ».
À la croisée de deux mondes
Le Concours est déjà en lui même un événement, qui est une sorte de trait d’union entre le passé, le présent et l’avenir. Aymeric Lebrun, des cycles Cyfac, l’explique parfaitement « On s’inspire du passé, on s’inspire du présent et on imagine le futur. Il y a une recherche constante de ce qui se faisait autrefois pour tirer de nos racines ce qui se fera demain. Ce Concours est lui même la résurgence d’un événement du passé que Julien Leyreloup a retrouvé lorsqu’il faisait les recherches pour créer les cycles Victoire. »
Les artisans qui travaillaient autrefois de façon isolée, et plutôt dans un mode concurrentiel, fonctionnent désormais en « confrérie ». Cette dynamique associative permet des échanges et du lien entre des constructeurs confirmés (certains ont plus de 30 ans d’existence), et à l’opposé on trouve des « rookies » qui se lancent dans cet artisanat. Cette union va permettre de structurer cette branche d’activité autour du vélo, et même de former de nouveaux cadreurs pour répondre à une demande de plus en plus forte de clients à la recherche de vélos à leurs mesures. Réunis sous la même bannière de ce Concours, et sur la base d’un même cahier des charges, nous retrouvons à Rambouillet 29 réalisations très personnelles, interprétées de façon différente par ces artistes de la construction.
L’imagination, non aseptisée de ces constructeurs, donne de la vie au vélo actuel. Bien sûr le vélo reste un cadre, des roues, un guidon une selle et un système permettant de le faire avancer et freiner. J’aime bien la comparaison faite par Matthieu Chaulet des cycles Pechtregon « La chaise existe depuis longtemps, et pourtant l’imagination des designers crée, depuis la nuit des temps, des nouveaux modèles. C’est toujours 4 pieds et la fonction reste la même. Le vélo c’est pareil, et pourtant la créativité de l’homme amène par petites touches de la nouveauté ...» Même remarque de la part de Frédéric Ducès des selles Idéale « La nouveauté se trouve parfois dans les choses qui existaient … ». Ce n’est pas forcément révolutionnaire, mais cela embellit et améliore le vélo.
Le concours de machines nous entraîne à la croisée de 2 mondes : celui du classicisme et celui du modernisme. Ces deux univers, que tout pourrait opposer, fusionnent pour donner le meilleur d’eux mêmes, pour faire naître ces superbes machines. Sur l’exposition des 29 machines qui sont en concours, nous avons retrouvé des montages avec des freins à tirage central par câble, qui ressemblent à s’y méprendre à nos vieux Mafac. À côté d’autres constructeurs auront fait le choix de freins à disques. Dans les deux cas ça fonctionne bien, et finalement deux machines, équipées ainsi différemment et posées l’une à côté de l’autre, semblent issues de la même famille. Il existe des systèmes intemporels qui ont le culot de traverser les âges du vélo pour venir faire un pied de nez aux vélos marketing qui se ressemblent tous. On redécouvre les vertus des triple plateaux que l’on revoit avec plaisir montés sur des machines modernes.
Il y a un petit côté “Concours Lépine” dans cet événement car chaque constructeur ira chercher le petit truc ou l’astuce qui fera la différence, pas pour épater le jury mais bien pour offrir le petit plus qui apportera au pilote de la machine un élément de confort ou d’efficacité. Sur ce plateau d’exposition au public on découvre également de la recherche esthétique et du design avec des plateaux découpés au laser, des peintures superbes, des systèmes d’éclairage intégrés, des porte-bagages enfin beaux et restant pratiques, … On pourrait passer des heures à examiner sur chaque machine ces petits trucs placés ça et là et qui, sur ces 1200 km que ces machines devront parcourir, feront la différence.
Écoutez sur Radio Cyclo l’interview d’Alain Puiseux, Président du jury de ce Concours 2019 et de Aymeric Lebrun, des Cycles Cyfac, membre de l’association et présent à ce Concours…
Et les équipements …
Existe-il une selle idéale ? … Oui : elle a faillit disparaître dans la tourmente de la mondialisation. Fred Ducès n’a pas voulu qu’elle meure et il fait renaître cette marque Idéale et ses selles en cuir montées sur des chariots métalliques. L’affaire a duré 5 ans mais il y est arrivé en retrouvant les ouvriers des établissements Tron Berthet, qui ont reproduit avec lui le processus de leur fabrication (Voir notre article). Elles trônent fièrement sur les cadres de quelques magnifiques réalisations de ce concours.
Pour les selles Berthoud c’est pareil, même si elles sont plus récentes et même si la conception et la fabrication sont différentes. Ces deux entreprises sont unies par le cuir et la qualité du produit, qui donnera à cet élément essentiel pour le cycliste, l’impression de rouler assis sur un « fauteuil », comme on dit dans le jargon cycliste.
Écoutez sur Radio Cyclo l’interview De Fred ‘selles Idéale) et de Clément (cycles Berthoud).
Pour les sacoches on voit également naître et renaître, dans le même esprit mélangeant classicisme et modernité, des produits qui apportent de la valeur ajoutée au voyage.
Rodolphe Pasciuto, qui a créé la marque Helmut (Voir notre article), fabrique ses sacoches à la main près de Chambéry. Pilote d’Enduro et grand voyageur, il a imaginé avec son expérience du voyage de nouvelles sacoches qui ont été choisies pour équiper certaines machines du Concours.
La randonneuse un vélo d’avenir
Le vélo c’est formidable … On avait oublié ce type de vélo au nom un peu désuet de “randonneuse”. Le terme faisait vieillot, car il évoquait trop sans doute l’époque du cyclotourisme de papa. L’apparition des vélos en carbone moulés en grande série en Asie, qui singent les vélos de course des champions vus à la télé, la naissance du VTT qui est venu offrir, à ceux qui voulaient sortir de routes, la liberté de rouler en pleine nature avaient ringardisé l’image de notre vieille randonneuse.
Elle revient au goût du jour, comme une belle synthèse « Allroad », permettant de rouler gravel ou route. Confortable sur des pneus de bonne section, équipée de transmissions au ratio permettant de passer partout, chargée de sacoches devenues souples et légères, …
Ce retour est dans l’air du temps : voyage, aventure, polyvalence, … On est fier désormais de sortir sa randonneuse, qui fait la pige à pas mal de vélos en carbone le dimanche matin dans les pelotons. On est content de pouvoir emprunter le beau petit chemin de terre que l’on a vu à droite de la route, sans craindre de casser en deux son vélo sur les premières pierres ou racines qu’on y trouvera. On est libre de mettre quelques sacoches de bikepacking sur notre vélo pour partir le temps d’un petit week-end ou plus sur les petites routes de France ou d’ailleurs.
Loin d’être issue d’un passé recomposé, tirée par la mode vintage, la randonneuse est au contraire un vélo très actuel qui accompagne l’évolution de notre société en recherche d’authenticité.
Retrouvez sur Radio Cyclo de nombreux podcasts réalisés à Rambouillet … Des interviews passionantes comme celle de Fiona KOLBINGER vainqueur récente de la Transcontinental Race venue participer également au Paris – Brest – Paris.
Allez sur le site du Concours de Machines pour découvrir dès qu’il sera publié le palmarès 2019.
Diaporama …
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