“Tiens un Méral !” … m’ont dit certains cyclistes avec lesquels j’ai eu l’occasion de rouler pendant le test de ce vélo. En général, ceux qui m’ont fait cette remarque avait plutôt les tempes grises, car la marque Méral était surtout connue dans les années 80. Elle avait disparue au moment de la période morose du beau vélo français. Les autres, un peu plus jeunes, me disent « Il est beau ce vélo, c’est quoi cette marque Méral ? ».
Cyfac, par une coup de baguette magique, ou plutôt grâce à quelques baguettes de soudure, a décidé de relancer Méral pour proposer des vélos de qualité, avec 3 tailles pré-définies. L’atelier de La Fuye, est l’héritier direct de cette marque mythique et sa renaissance est l’oeuvre d’Aymeric Lebrun, qui souhaite ainsi nous rappeler que l’artisanat français sait encore produire de beaux vélos. Avec ce modèle Louison, qui est un pur routier (accompagné du modèle féminin baptisé Louisette), Méral dispose désormais d’une gamme complète avec deux randonneuses (Francis et Francette) et deux gravel (Hansel et Gretel). Chez Méral on aime rouler en couple, c’était déjà le cas dans les années 80 : le dessin du cadre femme avait séduit de nombreuses cyclistes.
Ouvrons le livre des souvenirs
L’histoire commence en 1968 avec la création du Groupe Sportif MÉRAL qui assura plus tard la présence du cyclisme français lors de la 14ème Course de la Paix, l’épreuve la plus prestigieuse du calendrier international amateur. Monsieur Métayer, industriel passionné de cyclisme et fondateur de ce groupe eu l’idée alors de créer les vélos de son équipe, qui courait avant sur des cycles de la marque Gitane. Les Cycles MÉRAL venaient de naitre en 1974 à La Fuye, avec à la tête de ses ateliers, Francis Quillon. La marque MÉRAL, emblématique des années 80, allait disparaître après avoir été rachetée par LEJEUNE. Si l’histoire de cette marque vous intéresse consultez cette page sur le site de la confrérie du 650.
Le nom de ce modèle : Louison, qui semblera peut-être désuet à certains d’entre-vous, puise son inspiration dans le choix qu’avait fait le grand champion Louison Bobet, d’apposer son nom sur un cadre MÉRAL. Les Cycles MÉRAL appartiennent au patrimoine du cyclisme sur route et cette renaissance est le signe d’une santé retrouvée du beau vélo à la française.
Le Louison
Voilà donc ce Louison arrivé chez moi après quelques péripéties avec le transporteur. Impatient je déballe le carton et je déshabille le vélo de ses protections pour découvrir ses superbes couleurs : un violet qui se marie avec du noir laissant apparaitre le tissage stratifié du carbone. Le résultat est très graphique. Louison existe en plusieurs versions et deux matériaux : l’acier qui utilise la série Columbus Spirit HSS et le carbone IM stratifié selon, le procédé développé par Cyfac depuis 2003.
J’ai choisi ce modèle carbone, car j’étais curieux de rouler sur ce cadre fabriqué en France. La technique utilisée par Cyfac, qui fabrique ce Méral, s’appuie sur un montage par stratification de différents tressages de carbone. Son triangle arrière avec ses haubans « Double Stay » est fabriqué soit par la marque irlandaise FiftyOne Bikes (pour les cadres avec disques) ou la marque italienne Deda (pour les freins sur jantes). Cette partie arrière pré-fabriquée est ensuite associée au cadre réalisé dans les ateliers de Cyfac.
Ce cadre est un pur stratifié, sans raccord, dont les tubes sont liés les uns aux autres par un enchevêtrement de fibres. L’assemblage des tubes qui arrivent brut se fait sur un marbre de montage, comme des cadres en acier. C’est le seul moyen de donner aux tubes les angles définis. C’est d’ailleurs cette même technique qui est utilisée par Cyfac pour fabriquer ses cadres carbone sur mesure. Un Méral carbone a donc la même qualité de fabrication qu’un Cyfac.
Je suis bluffé par le rendu esthétique du cadre que je découvre. Les raccords sont lisses, le faible diamètre des tubes et des haubans donne au vélo un aspect de légèreté que beaucoup de vélo en carbone ont perdu avec des “poutraisons” volumineuses que l’on voit trop souvent. La qualité de la peinture made by Cyfac est reconnue et ce n’est pas ce vélo qui fera mentir sa réputation. Le violet irisé est magnifique et vous aurez le choix entre 6 couleurs : bleu, blanc, rouge en uni et doré-noir, violet-noir, orange-noir en 2 tons.
Côté équipement c’est pas mal non plus. Je suis un peu déçu en voyant sur un tel vélo des roues DT Swiss 1600 PR en aluminium qui ne sont pas le haut de gamme de la marque. Lors de l’essai je reviendrais sur le rendement de ces roues qui se sont montrées parfaitement à la hauteur. Le groupe est un Campagnolo à disque hydraulique Potenza à 11 vitesses en aluminium.
Potence et guidon Pro PLT en alu. Cyfac a fait le choix de monter ces équipements en alu sur ce cadre carbone et fait l’inverse sur le cadre en acier.
L’essai
J’ai pu disposer du vélo environ 3 semaines et l’essai s’est déroulé sur les routes bien chaudes des Bouches-du-Rhône, du Var et du Vaucluse.
Première surprise au moment de régler le vélo à mes cotes. Je constate qu’il est équipé d’une potence de 11 cm. Je me dit que ça va être délicat pour reporter tous mes réglages pour moi qui généralement utilise une potence de 9 cm. Après avoir monté la selle à la bonne hauteur je prends mon mètre pour mesurer la cotre centre selle <–> centre guidon : 700 mm et finalement je retrouve ma cote habituelle à 2 mm près. Donc le cadre est court. Cela se vérifiera en constatant un phénomène de “toe overlap” : pédale à l’horizontale ma pointe de chaussure (taille 42) touche le pneu. À noter que cela n’est absolument pas dangereux, ni handicapant lorsqu’on roule : il n’y a aucune chance que la roue vienne toucher le pied.
Ma toute première sortie, destinée à “sentir” le vélo, va me faire découvrir une vélo très réactif et assez polyvalent. Je trouve immédiatement mes marques et j’apprécie l’ergonomie des manettes Campagnolo. La transmission est efficace tout comme le freinage sur disques.
Les choses sérieuses ont commencé. Rien de tel que des sorties en groupe avec des cyclistes que je connais pour jauger les capacités de performance d’un vélo. Je connais dans le groupe les meilleurs grimpeurs et je pourrais comparer ma performance avec cette référence. Dès les premières accélérations dans les bosses, le vélo part très facilement. Je suis facilement les meilleurs du groupe et c’est déjà un bon indice.
Je suis un très mauvais descendeur et pourtant je colle les plus rapides et je constate qu’il y a sur ce vélo un équilibre des masses entre l’avant et l’arrière qui est parfait. Mains au fond du cintre, doigts sur les leviers le vélo plonge dans les courbes sans broncher. Les roues DT Swiss qui ne constituent pas une monte “haut de gamme” se montrent à la hauteur. Le vélo file à une vitesse incroyable et parfois je me dis qu’il n’y a pas assez de dents sur le grand plateau. Plus les kilomètres passent et plus je prends l’ascendant sur le groupe en tirant le petit peloton sur le plat à plus de 40 km/h, ce qui est pour moi une bonne performance. J’ai l’impression que le confort du vélo m’économise plus que mes compagnons de route. Ce vélo est un routier sportif et il le prouve.
Les mauvaises langues, qui diabolisent le carbone et sa légendaire rigidité, peuvent encore une fois mettre de côté leurs certitudes. Ce vélo se montre confortable au-delà de 100 km et sur les routes granuleuses du Vaucluse il filtre bien les irrégularités. Avec ses pneus Schwalbe Pro One Tubeless Easy de Schwalbe de 28 mm (mesurés 29), montés avec chambres (dommage) et gonflés à 6 bars je suis toujours rentré de mes sorties longues sans être “cassé”.
Au total j’ai fait, lors de cet essai, 500 km de route, seul, mais souvent en groupe et j’ai vraiment apprécié ce vélo qui sera effectivement un excellent “routier” au caractère sportif évident. Il m’a démontré son aisance dans les montées, comme sa précision et sa sureté dans les descentes. Sur le plat et en descente le vélo reste bien en ligne avec une chasse assez importante de 63 mm (en taille M) qui lui donne cette stabilité. La fourche affiche un déport classique de 45 mm.
La répartition des masses, avec ce léger transfert vers l’avant, procure un bon équilibre au vélo et la motricité et la stabilité sont améliorées. Le seul regret que je peux exprimer se situe au niveau des équipements alu montés sur ce vélo. J’aurais bien aimé ressentir encore plus de “peps”, avec des éléments en carbone et des roues plus haut de gamme. Bon et si je veux chipoter un peu : le collier de serrage de tube de selle dénote un peu sur un cadre en carbone, mais rien à dire sur le côté fonctionnel, il est efficace.
Je vois vos yeux briller, mais il reste un dernier obstacle : le prix de ce cadre à 3090 €. Sa fabrication soignée et artisanale le justifie. Il faut comparer ce tarif à ce que l’on trouve en fabrication moulée en plus grande série à Taiwan ou ailleurs. Le Louison sera plus accessible financièrement dans sa version acier Columbus HSS : 2090 €.
Caractéristiques
- Version Carbone : Carbone IM Stratifié – Tubes Ronds T700 – Arrière Carbone Deddaciai
- Freinage sur Jante ou Disque flatmount
- Fourche carbone Columbus Futura Disc SLX carbone 1-1/8” – 1-1/4”
- Taille de roues maximum recommandée : 700x30C
- Diamètre Interne Tube de selle : 27,2mm
Boîtier de pédalier fileté BSC - Axes traversant 12x100mm & 12x142mm fournis (version disque uniquement)
- Passage interne freins & dérailleur – Compatible : Mécanique, Shimano Di2, Campagnolo EPS, Sram eTap
- Collier de dérailleur avant amovible fourni
- 3 Géométries (Petit, Moyen, Grand)
Voir infos et détails sur le site de Méral