Depuis que les vélos existent, les cyclistes cherchent à optimiser leur pédalage. Ils ont très vite remarqué qu’attacher les pédales aux pieds permet de bénéficier d’un meilleur transfert de puissance dans toutes les phases du « cercle vertueux ». Après les sangles-straps, les cale-pieds à lanières, toutes les combinaisons possibles de clipsages mécaniques, on pensait que tout avait été inventé … Mais non, voici que les Autrichiens de Magped proposent un système aimanté, décliné pour la route et le VTT. Irrésistiblement attiré par cette idée, j’ai choisi de tester le modèle route sur – je vous le donne en mille – mon pignon fixe. Avec mon ratio de 47 X 17, nul doute que la puissance nécessaire en montée et la fréquence de pédalage en descente devrait permettre de pousser la “Magped Road” dans ses derniers retranchements… Attention Magped, me voilà, et en pignon fixe de surcroît !
Présentation des Magped
Sur le papier, le principe des Magped est très simple : la pédale est équipée d’un aimant néodyme à charge magnétique constante dans le temps. La chaussure, quant à elle, reçoit une plaque en acier qui viendra se plaquer sur l’aimant de la pédale. Dans les faits, le système Magped est très élaboré, puisque la gamme de pédales VTT, qui comprend 4 modèles, permet d’interchanger des aimants plus ou moins puissants en fonction du type de pratique et du poids du cycliste : un aimant de 100N de puissance pour les cyclistes pesant moins de 65 kg, 150N pour les cyclistes entre 65 et 90 kg et 200N pour les cyclistes faisant plus de 75 kg et/ou pratiquants d’enduro. Pour information, la force d’adhérence d’un aimant s’exprime en newtons (N), 10N correspondant à peu près à une résistance d’1kg.
En ce qui concerne les pédales route que je vais tester, il n’existe qu’un seul modèle, équipé de l’aimant le plus puissant, soit 200N. Au sortir de la boîte, ces pédales sont superbes. La ligne est épurée, le design original. le revêtement gris mat des plateformes tranche vivement avec les axes en titane.
Sur la balance, avec 138 g pièce, les pédales sont certes plutôt bien placées, la légèreté de l’axe en titane s’équilibrant avec la pesanteur de l’aimant. Mais la plaque métallique sous la semelle est beaucoup plus lourde que les cales en plastiques des autres marques de pédales route, On a donc affaire à un produit de qualité, aux finitions irréprochables, mais qui se situe, à ce prix de vente, parmi les pédales route les plus lourdes de leur catégorie. Pour ce qui est de la notice de montage, elle est aussi expéditive qu’un sprint de Peter Sagan ; il va falloir se débrouiller tout seul…
Montage et réglage des cales
En fait, le montage des cales est plutôt aisé et intuitif, et permet surtout des réglages précis, en trois phases bien distinctes. Tout d’abord, on fixe à même la semelle, sur le système 3 points caractéristique des cales routes, la plaque métallique. C’est à ce premier stade que l’on règle l’avancée/recul par rapport à la pédale, et rien d’autre, ce qui permet de se focaliser uniquement sur ce paramètre, sans se préoccuper du décalage droite/gauche.
Car c’est à l’étape 2 qu’on règle (et uniquement à ce stade) le calage droite/gauche : lorsqu’on vient, avec 4 autres vis, fixer la cale en plastique sur la plaque métallique. Ainsi, les deux réglages cardinaux (avant/arrière et droite/gauche) se font à deux étapes bien distinctes, ce que je trouve très clair et fort pratique.
Les deux derniers réglages, à savoir l’ouverture/fermeture de l’angle du pied et la liberté angulaire se règlent lors d’une troisième et dernière étape, directement sur la pédale, par l’intermédiaire de deux butées vissantes qui viennent enserrer la partie avant de la cale. Là encore, ce système de réglage est extrêmement intuitif et précis, puisque le vissage/dévissage de ces deux butées permet un réglage micrométrique et contrôlable d’un simple coup d’œil en venant “clipser” la chaussure sur la pédale.
Premiers essais
Lorsque j’enfile mes chaussures, la toute première bonne surprise vient de l’étonnante finesse de la cale sous la chaussure. Bien sûr, on n’est pas aussi à l’aise qu’avec des chaussures de VTT où la cale s’intègre dans la semelle, mais on n’a pas non plus l’impression de marcher sur les talons comme un pingouin, et le plastique relativement tendre des cales garanti une certaine sécurité lors des déplacements pédestres sur surfaces lisses. Carrelages et sols mouillés seront beaucoup moins dangereux avec ce type de cales qu’avec les traditionnelles briques de Lego proposées habituellement sur les pédales route.
J’enfourche mon vélo et je cherche du bout du pied le contact avec la pédale. J’utilise habituellement un système de pédales double-face aussi bien en route, en gravel qu’en fixe (Crankbrothers) et là, bien sûr, je me retrouve sur un système simple-face qui, comme les autres systèmes de même type, présentent naturellement la pédale avec la fixation en dessous. Il faut donc, de la pointe du pied, retourner la pédale avant de clipser. mais cela ne présente pas de difficulté particulière, en tout cas pas plus qu’avec les systèmes que j’ai déjà essayé par le passé.
La deuxième bonne surprise est sensorielle : aucun bruit et aucune secousse mécanique lors de l’arrimage entre la chaussure et la pédale, c’est un bien beau cadeau offerte par le système magnétique. Il n’y a aucun effort à produire pour “enclencher” ; ce mot d’ailleurs n’est pas approprié à ce que l’on ressent lorsque la chaussure s’adapte à la pédale. Idem lorsqu’on “déclipse” (mot nouveau à inventer ! Lorsqu’on “démagnète” ?) La chaussure quitte la pédale sans bruit et surtout sans aucun effort. Ce qui me fait douter de l’efficacité du système… Pour en avoir le cœur net, il faut maintenant quitter ma rue et aller essayer ces pédales sur les routes.
Décrochages intempestifs
Me voila parti pour un circuit exigeant d’une centaine de kilomètres dans le Gard. Je l’ai tracé en choisissant une palette de situations diverses : routes lisses, goudrons dégradés, plat, faux-plat, montées sèches, descentes, courbes… histoire de tester ces pédales dans tous les contextes possibles et imaginables. Grâce à ma pratique intensive du pignon fixe, je pédale plutôt souple et rond, et j’utilise généralement des cales sans liberté angulaire. Pour ce test, j’ai néanmoins décidé de laisser un tout petit peu de liberté angulaire, car avec de nouvelles cales et un nouveau réglage, il vaut mieux pouvoir changer légèrement de position de pied pour éviter d’éventuelles douleurs aux genoux. J’effectue ce parcours à bonne intensité, sans relâcher mon effort, en essayant d’oublier que je n’ai pas mes pédales habituelles.
Globalement, ça marche : je me sens à l’aise sur les pédales, les portions de plat s’enchaînent avec fluidité et mes genoux sont parfaitement en ligne. Les plateformes, de grande surface, offrent un très bon appui du pied et un excellent transfert de puissance lorsque je me mets en prise dans les montées. Au début je ressens le poids des pédales, plus lourdes que mes pédales habituelles, mais cette sensation disparait dès les premiers kilomètres, par la suite je ne me sentirai pas du tout handicapé par le poids des pédales.
J’ai beau tirer au maximum en danseuse mon 47X17 dans les montées, le pied reste bien en place, aucun décrochage à déplorer. Par contre, en écartant un peu trop brusquement le genoux gauche pour chercher mon téléphone dans ma petite sacoche de top tube puis en négociant mal une courbe un peu rapide, je décroche deux fois (sans dommage heureusement) mais cela me vaut une belle frayeur : en pignon fixe, le pédalier continue de tourner lorsqu’on décroche, et on risque des chocs douloureux des pédales contre les jambes… Heureusement, plus de peur que de mal, je retrouve ma pédale sans problème en ces deux occasions accidentelles. Je comprends que ces pédales, parfaitement fiables tant que les forces sont axiales, décrochent très vite lors d’efforts latéraux. c’est logique, la finesse de réglage des butées vissantes permet d’agir sur ce paramètre, mais aussi sur un autre : Plus les vis sont écartées, plus on obtient de la liberté angulaire, mais plus le décrochage est facile.
Je m’applique donc à bien garder la ligne pour la suite de ce tour, malgré le réglage légèrement flottant que j’avais prévu. Cela ne me demande pas de difficulté particulière, juste un peu de concentration, car j’ai l’habitude de rouler avec les pieds bien en ligne et avec des cales sans liberté angulaire. Mais voilà que se présentent les descentes les plus raides du parcours, dans les montagnes russes entre Cabrières et Poulx. Là, c’est moins drôle. Avec une très haute fréquence de pédalage (autour de 130 tours/minute), je suis victime de plusieurs décrochages du pied droit ; chaque fois, c’est la chaussure qui s’en va vers l’avant au moment où la manivelle redescend juste après la position horizontale, ce qui est sanctionné systématiquement par un douloureux retour de pédale dans le talon… Je m’arrête, quitte mes chaussures pour les fixer sur les pédales et comparer le réglage des butées vissantes. Comme je l’avais ressenti sur le vélo, à droite la liberté latérale est plus importante, ceci explique cela.
Petits arrangements
De retour à la maison, je me penche sur le réglage des butées vissantes situées sur les pédales, qui servent à la liberté angulaire et au positionnement axial des chaussures et je décide de réduire l’espace entre les butées et les cales au maximum. J’ai un doute sur la tenue de ce réglage dans le temps, car les butées se vissent et se dévissent trop librement à mon goût ; de plus, les petits tubes en plastique vert fournis pour stabiliser les réglages sont trop courts pour le réglage que je souhaite stabiliser.
Qu’à cela ne tienne, je dénude un peu de gaine de fil électrique pour obtenir un tube à la longueur désirée et je dépose sur le filetage des vis de butée une goute de frein-filet. Puis, je règle les butées de façon à orienter les chaussures à ma convenance sur les pédales, sans laisser d’espace et d’angle entre les butées et les cales. Reste à tester ce réglage sur une nouvelle sortie…
Bilan
Le lendemain, une sortie de 90 km, menée à vive allure dans les Alpilles, me conforte définitivement dans mes choix. Plus aucun décrochage à déplorer dans les descentes avec une haute fréquence de pédalage, le pied est bien aligné, le pédalage est fluide, l’absence de liberté angulaire me convient parfaitement et ne change qu’une chose : Pour “démagnéter” de la pédale, il faut une rotation franche du talon, jusqu’à un déclenchement qui ressemble exactement, pour le coup, à celui des pédales classiques. Que du normal donc, en gardant le bénéfice d’un enclenchement très doux et silencieux, une parfaite tenue lors du pédalage, et un bon confort de marche hors du vélo.
Je vais donc avec plaisir conserver ces pédales sur mon vélo, je les ai définitivement adoptées. Si je devais apporter des réserves, c’est uniquement sur la durée de vie des cales en plastique, fabriquées dans une matière relativement tendre, ce qui garanti une bonne adhérence et du confort au sol durant la marche, mais qui va sans doute faire qu’elles vont s’user rapidement. Bien sûr, on peut en acheter en remplacement sur le site de Magped, mais il faut voir si leur durée de vie justifie leur prix de 14€. Pour être absolument précis en terme d’évaluation, j’ajoute qu’en l’absence de tests complémentaires, j’aurais tendance à déconseiller ces pédales aux cyclistes très lourds et puissants, surtout s’ils aiment les fixations à grande liberté angulaire. Bien sûr, tout le monde ne roule pas en pignon fixe, aussi mes réserves sont à tempérer au vu des fréquences de pédalage extrêmes que j’ai imposé aux pédales durant ce test.
190€ la paire… Pour ce tarif, on a du moyen, voir haut de gamme quand y a des promos ! (tiens, y a des Dura Ace à ce prix en ce moment dans des magasins français)
Et à ce prix là des pédales qui se décrochent toute seules (et c’est les aimants les plus puissant… ), et qu’il faut bidouiller soit même pour éviter que cela arrive, c’est globalement du foutage de gueule.
Personnellement, je ne suis pas du tout convaincu par ces pédales, leur seul intérêt réside dans la proximité avec l’axe de la pédale, le reste, poids, surface d’appui se retrouve chez les conçurent, mais pour moins cher.
En plus le claquement des automatiques fait parti du charme du vélo, perso j’aurai du mal à m’en passer, et je crois pas avoir rencontrer quelqu’un que ça ennuyai.
Bon au moins ça fait de l’innovation, ça forcera les autres à faire plus de recherche aussi, en attendant je reste sur mes Time.
Bonsoir Sautenvick,
Je comprends ton argument sur le bruit du déclipsage, le vélo est un sport mécanique, pour ma part j’adore le bruit de ma roue-libre Campagnolo sur mon vieux vélo de route 🙂
Pour ce qui est du “bidouillage” par contre, je ne suis pas du tout d’accord avec toi. Je préfère nettement un système “ouvert”, aussi perfectionné et luxueux soit-il, qui me permette d’intervenir en m’offrant de l’autonomie, voire laissant de la place à la créativité, l’adaptation, le détournement, plutôt qu’un système fermé et trop protégé, qui favorise l’obsolescence et rende prisonnier d’une marque.
Merci de nous lire,
Dan
bonjour
a votre avis, ce type de pédale peut il être conseillé pour une femme débutante en pédale automatique ?
cordialement
pp
Pourquoi pas ? Je ne vois aucune contre-indication. En revanche, la question à poser à un(e) débutant(e) serait plutôt : “Souhaitez-vous favoriser le transfert de puissance, ou la possibilité de marcher avec vos chaussures auto ?” car en fonction de l’intensité de la pratique, il peut-être préférable d’être à l’aise au sol avec des chaussures “2 points” (VTT, touring) et les cales correspondantes (SPD, Crankbrothers…). Dans cette option, les pédales Magped sont “pur route”, c’est à dire qu’il est difficile (et déconseillé) de marcher avec.