La sortie du nouveau Topstone Carbon était attendue. Il faut avouer que Cannondale est une marque un peu à part, dotée d’un esprit novateur et original, et développant des solutions techniques différenciantes. Patrick avait déjà eu l’occasion de tester les versions précédentes et sa conclusion était sans appel en 2019 : « Un des meilleurs gravels que j’ai pu rouler jusqu’alors avec le sentiment que ce Topstone peut nous emmener partout grâce à sa polyvalence ».
En trois ans, l’univers du gravel et ses « standards » et caractéristiques ont quelque peu évolué. Voyons si les évolutions du Topstone 2022 et le test réalisé le classent toujours dans les tops de la catégorie.
J’ai eu l’occasion de tester le Topstone Carbon 2L équipé d’une partie du système SmartSense, système « intelligent » intégré développé avec Garmin et dont nous dirons un mot à la suite des tests terrain.
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À vous de jouer !
Les évolutions et les caractéristiques
On retrouve toujours le fameux système Kingping qui permet une flexibilité à l’arrière de 30 mm grâce à une conception spécifique du triangle arrière et du tube de selle.
Ce Kingping, rappelons-le, n’est pas une suspension, mais apporte un flex pour plus de confort et d’adhérence sur la partie arrière, en jouant uniquement sur la flexibilité de la matière combinée à l’unique point de pivot à roulements. La conception a encore été améliorée afin de réduire encore plus les frictions et obtenir une plus grande sensibilité tout en gagnant 100 g au passage. On croit Cannondale sur parole, difficile de vérifier n’ayant pas testé la version précédente pour ma part. En tout cas, comparé à l’entretien d’une vraie suspension (qu’il ne remplace pas), ce système la réduit à sa plus simple expression avec cet axe traversant et c’est tant mieux !
Autre évolution majeure que certains attendaient – en particulier ceux pour qui le gravel rime avec Offroad et qui ont une pratique plus singles et chemins que bitume – c’est la possibilité de monter des pneus plus généreux. De 38/40 mm par 700 sur l’ancienne version, Cannondale annonce une monte possible jusqu’à 45 mm en 700 et 2.1 en 27,5. Dans la réalité vous pourrez monter au-delà. L’ayant reçu avec des pneus de 38 mm, je l’ai très rapidement passé avec les Hutchinson Tundra mesurés à 49 mm aux crampons sur ces jantes WTB de 23 mm de largeur interne. Des 47 mm passeront donc sans souci et sans risquer d’abimer le cadre.
La géométrie, déjà très au point, évolue par petites touches. La douille de direction est un poil plus courte et les bases 5 mm plus longues et asymétriques pour pouvoir accueillir les gros pneus restent tout de même dans une moyenne très basse à 420 mm. Le top tube est un poil plus haut, et sa longueur effective généreuse inchangée est bien dans la tendance avec une potence assez courte de 80 mm pour cette taille SM. Le tube de selle est court, ce qui confère au Topstone un sloping assez prononcé, ce qui n’est pas pour me déplaire venant du VTT. L’angle de direction est plutôt prononcé ce qui devrait jouer sur la stabilité de l’ensemble. Toujours 5 tailles sont proposées au catalogue.
Notons que Cannondale travaille spécifiquement chaque taille de vélo, afin que les sensations de pilotage soient les plus similaires possibles quelle que soit la taille du vélo. C’est la technologie Proportional Response.
La fourche en carbone est également très réussie avec tout ce qu’il faut comme inserts et perçages pour partir voyager sereinement avec un passage interne de la durite.
Le cadre est également doté de très nombreux inserts et vous permettra de fixer des garde-boues.
Niveau couleur et design, Cannondale a la bonne idée de proposer quelques modèles en deux coloris différents : un modèle à coloris uni plus classique et un modèle plus original, avec plusieurs teintes comme celui-ci. Personnellement je trouve ce design très réussi avec ce panaché de verts. La peinture et finition sont très qualitatives.
Les passages des câbles et gaines se font en interne ou semi-interne. Et des câbles il y en a beaucoup avec ce système SmartSense, nous y reviendrons plus tard.
Sa batterie trouve son logement dans le cadre. L’ensemble est évidemment étanche, vous pourrez laver le vélo au jet sans souci.
Les équipements
Pas moins de 11 versions sont disponibles à des niveaux d’équipements très variables, différenciées également par les options SmartSense, la fourche à suspension Lefty Oliver, des roues de 650B et une tige de selle télescopique.
Chacun trouvera donc Topstone à son pied normalement.
En ce qui concerne ce modèle Carbon 2L, on retrouve l’excellent groupe Shimano GRX en version haut de gamme 800 11V double plateaux. Une référence désormais et une valeur sûre.
Des roues WTB KOM Light en 23 mm de largeur interne avec un moyeu Formula.
Bonne pioche pour l’entretien avec l’utilisation d’un boitier BSA 68 mm
Niveaux périphériques, Cannondale fait appel à ses produits maisons : tige de selle carbone en 27,2 mm pour amener encore plus de confort, potence et cintre alu Cannondale et à une selle Fizik Terra Argo X5 déjà testée sur Bike Café avec succès mais cet élément reste très personnel…
Le capteur de roue Wheel Sensor vient compléter ce tableau.
Au niveau du poids, Cannondale ne communique historiquement pas le poids de ses vélos. Le comportement d’un vélo n’est avant tout pas dicté par son poids mais par sa conception, sa géométrie et la répartition des masses. En caricaturant un peu, un vélo très léger peut sembler lourd et pataud et un vélo plus lourd excellent et aérien. Avant de parler de poids, la sensation et l’expérience sont prépondérantes sur ce vélo un peu à part. Allez, pour les aficionados de la balance, ce n’est tout de même pas secret de polichinelle car très facilement vérifiable, j’ai pesé ce Topstone en taille S sans pédales et avec les pneus montés d’origine en tubeless à 9,375 kg, pesée réalisée à la fin du test donc n’influençant en rien mon avis durant le test. Sachant que la batterie pèse à elle seule 180 g, et sans les éclairages et câblerie, nous sommes en dessous des 9 kg.
Au niveau tarif ce modèle est proposé à 5199 €, un sacré budget donc. La gamme Carbon s’étend de 2949 € à 8999 € pour le très haut de gamme.
Après ces présentations de circonstances, voyons si ce Topstone roule au-dessus des pierres comme son nom le laisse supposer.
Le retour terrain
Tout d’abord, je scinderais le retour terrain de la présentation du système SmartSense qui n’influe en rien sur le comportement du vélo qui existe d’ailleurs sans cette option comme dit plus haut.
Ce Topstone a été roulé sur environ 800 km, comme de coutume sur tout type de terrain. Majoritairement tout de même sur chemins et singles puisque c’est plus ma pratique gravel sur mes terrains de jeux.
D’emblée la position est trouvée et je ne toucherai à aucun réglage sur le vélo durant tout le test.
Effectivement, aux premiers roulages, les sensations sont tout de suite différentes des autres gravels testés. Une sensation d’extrême confort à l’arrière mais sans perte de rendement pour autant avec d’excellentes relances et un maintien aisé de la vitesse de croisière. La rigidité latérale est au rendez-vous avec un boitier généreux. Le vélo répond instantanément. Le système Kingpin produit son effet ! Et il est bienvenu pour soulager mon dos plutôt fragile.
Comme annoncé par Cannondale ce n’est pas une suspension mais un flex qui apporte confort et je dirais même un certain renvoi d’énergie.
En montée, le système apporte également une adhérence supplémentaire. J’aurais juste préféré une cassette un poil plus généreuse pour passer les “montées impossibles” plus sereinement.
Du coup, en comparaison de l’arrière, la partie avant semble bien raide avec la fourche carbone et les pneus de 38 mm peu cramponnés. Pour équilibrer un peu l’ensemble, je monte des pneus bien plus larges afin d’apporter une touche de confort supplémentaire à l’avant. Tant qu’à faire je monte des pneus cramponnés, les Tundra de chez Hutchinson testés récemment, pour aller jouer un peu plus dans les singles et parties techniques et le pousser un peu dans ses retranchements.
Ce changement, couplé à une baisse de pression à 2 bars environ, m’apporte vraiment une touche de confort supplémentaire sans être trop collé dans les parties caillouteuses ou lisses. Sur route, le vélo reste encore très performant mais évidemment un peu plus difficile à emmener. Chacun fera ses choix en fonction de sa pratique et son terrain de jeux. Un pneu plus roulant à 45/47 mm pourrait être un très bon compromis.
Direction la forêt et les parties techniques. Le système Kingpin jouant sur la flexibilité du carbone (30 mm ce n’est pas rien), je demande quand même par précaution à Cannondale si je peux engager un peu sans risque de casse. Le feu vert est donné, aucune question à se poser.
Le vélo est très stable et rassurant. Il permet de ne pas trop se poser de question en descente. C’est simple, je n’ai jamais été autant à l’aise ni en confiance avec un gravel. Les vitesses de passage approchent celles d’un VTT. Du tout bon. Du coup, malgré des pneumatiques plus généreux apportant une touche de confort, on en vient à rêver pour ma part à un système de flex avant ou même une suspension pour être au niveau de l’arrière. Ça tombe bien, le Topstone est aussi proposé avec la fourche gravel Oliver. Patrick l’avait testée dans cette configuration et l’avait appréciée pour une pratique ludique et engagée. J’entends déjà certains dire, autant prendre un VTT. Chacun ses choix et convictions, mais un VTT ne sera pas aussi rapide sur les parties roulantes, chemins et routes et vous fatiguera plus.
Le Topstone enroule également parfaitement dans les singles grâce à une géométrie bien pensée, une potence assez courte et des bases réduites parfaites pour les relances.
J’aurais bien aimé un cintre avec encore un poil plus de flare et une largeur plus généreuse pour une prise en main plus ferme sur ce terrain de jeu. Mais ce choix reste très personnel et le flare de 12° est déjà très appréciable et plus adapté pour ceux qui roulent sur route et chemin. Ce cintre est en tout cas très confortable et la position est trouvée de suite.
Rien à redire sur les roues qui n’ont pas bougé et qui contribuent à la cohérence et la performance de l’ensemble. Pas de remarque sur l’excellente transmission GRX. J’aurais aimé cependant une cassette plus grande que la 34 d’origine couplé au petit plateau de 31, mais cela reste très personnel. Le freinage GRX800 est toujours sans reproche, très puissant et endurant. Bref, un test terrain très concluant.
L’Ecosystème SmartSense : fait-il sens sur le Topstone ?
Le système SmartSense est un système intelligent connecté, destiné à renforcer la visibilité et la sécurité du cycliste.
Il est composé d’un éclairage avant et arrière dont l’intensité s’ajuste à la décélération, d’un radar Varia (en option), du capteur de vitesse et de l’application Cannondale App. Un vélo 2.0 en quelque sorte.
Tout ce beau monde est alimenté par une batterie intégrée au cadre et amovible rechargeable avec un câble USB-C. Pratique, car cela permet de n’avoir qu’une source de puissance, qui gère plusieurs fonctionnalités. L’éclairage a été développé avec Lezyne et le radar avec Garmin sur la base du Radar Varia.
Concernant le capteur Cannondale / Garmin, il vous permettra d’enregistrer toutes vos sorties via l’application My Cannondale téléchargée sur votre Smartphone, GPS Garmin ou Wahoo. L’appairage est très simple et rapide.
L’application, grâce à l’enregistrement de l’historique, et à la manière d’une voiture, vous donnera également les intervalles de révisions ou vérifications de chaque pièce sur le vélo.
Vous pourrez également enregistrer tous vos réglages et ajustements.
L’application est vraiment intuitive et très bien réalisée. Moi qui ne suis ni un geek, ni un utilisateur régulier de ce genre d’équipements, puisque je roule l’immense majorité du temps sans équipement électronique, j’ai pu aisément connecter puis utiliser et enfin naviguer dans l’application. Elle permet également de piloter le système SmartSense, les éclairages et le radar.
Au niveau de l’écosytème SmartSense, je n’ai pas pu tester l’ensemble complet avec radar Varia, puisque le vélo était équipé uniquement du système d’éclairage sans le radar. Mais j’avais déjà eu l’occasion de tester ce radar, qui apporte un vrai plus pour la sécurité. L’intention de Cannondale est donc très louable concernant les aspects sécurité. Et le fait d’avoir une seule batterie pour tout alimenter peut vous simplifier la vie, plutôt que d’avoir X batteries à recharger pour chaque éclairage.
Mais ce Smartsense dans sa configuration actuelle n’intéressera selon moi qu’un certain type de vélo et de cycliste. Je m’explique.
L’autonomie de la batterie est restreinte à 3,5 h environ si on utilise les deux éclairages simultanément ce qui est l’objectif du système en terme de sécurité.
Le système pourra intéresser les cyclistes qui réalisent des sorties « courtes ». Au-delà de ce temps, les éclairages s’éteindront et donc vous ne bénéficierez plus des avantages du système. Vous pourrez économiser un peu en éteignant l’avant qui se rallumera cependant dans les zones sombres car il est doté d’un capteur de lumière. Et gérer l’utilisation ou pas de vos éclairages selon les terrains pratiqués via l’application. L’éclairage avant fabriqué par Lezyne délivre en permanence 350 lumens non réglable ce qui est suffisant de jour tout comme celui de l’arrière de 25 lumens qui est doté d’une forme très large et visible. Mais de nuit cette puissance de 350 lumens à l’avant reste tout juste correcte en utilisation route et clairement insuffisant en éclairage et pratique gravel sur chemins et singles en forêt. Surtout en comparaison avec ce qui se fait en terme de puissance et d’autonomie sur les éclairages actuels.
L’utilisation concerne donc selon moi des cyclistes réalisant des sorties de moins de 3,5 h ou qui calculeraient précisément leur retour de sortie de nuit pour bénéficier du reste de batterie disponible. Ou qui joueraient en permanence avec les différents modes avant/arrière via l’appli. Ce ne serait plus en accord dans ce cas avec les objectifs du système censé vous faciliter la vie et vous protéger aussi bien à l’avant qu’à l’arrière.
Il pourrait peut-être intéresser les vélotaffeurs, la batterie étant facilement amovible et rechargeable.
Rajouter un éclairage supplémentaire de secours n’aurait que peu de sens. Une seconde batterie dans la poche, pourquoi pas ? Pour atteindre les 7 h et passer la nuit. Mais cela rajoute du poids et un coût supplémentaire.
Ce Topstone est clairement orienté longues et belles sorties grâce à son excellent confort et est parfait pour des trips bikepacking avec ces nombreux inserts. Donc un éclairage à la grande autonomie serait selon moi plus en accord avec ce Topstone.
Erreur de casting ou plutôt progrès à réaliser pour améliorer et adapter ce système intéressant au Topstone ? Le système est en constante évolution et devrait progresser sur ces points. L’éclairage classique au choix du cycliste me semble encore la meilleure solution en termes d’autonomie, de versatilité et d’entretien. D’autant que le choix de positionnement des éclairages (cintre, potence, prolongateurs, sacoches, tige de selle, fourche, etc…) varie en fonction de plusieurs critères.
La multitude de câbles intégrant le cadre ainsi que le positionnement des éclairages captifs du vélo figent leur emplacement. Et en bikepacking, l’éclairage est un élément qui doit être placé en fonction du combo utilisé, qui peut être différent à chaque trip.
Il sera donc difficile de positionner des sacoches bikepacking, les câbles étant gênants. Cannondale essaie de corriger le tir en attendant et propose des extensions pour déplacer les éclairages plus bas et libérer de la place pour la bagagerie. Précisons que les éclairages sont fixés sur des supports de type GoPro, un très bon point.
A l’arrière, même principe, avec des supports à positionner plus bas sur la tige de selle, Cannondale ayant laissé du « mou dans le câblage.
Ces déports représentent une solution qui peut être testée, mais qui ne pourra pas tout de même systématiquement faire accepter l’accroche des sacoches de selle, tout dépendra de leur taille, leur encombrement et de la sortie de selle disponible. De plus, je trouve que cela casse la belle esthétique du vélo en rajoutant des supports supplémentaires.
Conclusion
Le Topstone évolue encore de façon notable. Le fait de pouvoir désormais monter de plus gros pneus est tout à fait en rapport avec son programme et ses objectifs de confort mais aussi de performance. C’est un gravel un peu à part de par sa technologie Kingpin très réussie amenant un vrai plus niveau confort sans sacrifier le rendement. On aimerait qu’un tel système de flex soit développé pour l’avant afin d’avoir un équilibre de confort avant/arrière mais sans l’équiper d’une fourche à suspension apportant d’autres contraintes. Une monte pneumatique généreuse permettra de s’approcher de ce souhait.
Le Topstone est équipé de nombreux inserts et sera parfait pour partir sur de belles sorties ou Divide au long cours.
Préférez alors pour ces pratiques les versions sans le système SmartSense qui reste à faire évoluer pour ces usages.
Au niveau prix, ce modèle est positionné dans une fourchette haute mais, par exemple, la version Apex à 3099 € vous permettra de goûter à l’expérience unique de ce Topstone Carbon. C’est un des gravels qui m’a le plus séduit également et que j’ai eu du mal à quitter !
Toutes les informations sur le site Cannondale
Dommage qu’il ne le propose pas en kit cadre. J’ai le topstone, ancienne version, et je l’adore !